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Channel: Histoire et mémoire Archives - Noisy le sec histoire

Histoire de l’école Cottereau

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La Révolution avait bien le désir d’œuvrer pour l’éducation, l’instruction des enfants, mais elle n’en a pas eu le temps ,trop à faire. Elle laissa aux communes l’initiative et la mise en place de cette charge . Et malgré les mesures prises par la Révolution contre les Congrégations religieuses, ce sont elles qui continuent encore à assurer cette mission.

Le Consulat, en 1802, marque la volonté de Napoléon-Bonaparte d’instituer un monopole d’État de l’Instruction pour mettre à distance les congrégations, sans toutefois les interdire .
Trois grandes catégories sont créées :
-Les écoles primaires
-Les écoles secondaires
-Les universités
En fait ,il faudra attendre 1816 mais surtout 1833 avec la Loi Guizot pour voir l’enseignement organisé au niveau national :
-toute commune de plus de 500 habitants doit avoir au moins une école primaire ,
-création des écoles primaires supérieures,
-création des Ecoles Normales pour la formation des instituteurs qui délivrent
un Brevet de Capacité d’Enseignement auquel il faut ajouter un certificat de moralité.

La loi prévoit d’aider les communes à aménager les écoles avec cour, préau , jardin et lieux d’aisance. Elle promet aussi de fournir du matériel collectif et individuel pour les enfants.
Le ministre F.Guizot a essayé de faire voter sa loi pour filles et garçons mais le gouvernement et les députés ont refusé . Le texte concerne donc uniquement les garçons; l’instruction des filles est laissée au bon vouloir des communes. De toutes façons, à la fin, ce sont les parents qui décident d’envoyer ou non leurs enfants à l’école.

A Noisy-le-Sec
Notre ville n’a pas attendu 1833.
Une première école remonterait à 1804, d’après un délibéré municipal de 1812 où un instituteur, M Trouet, perçoit depuis 1804, un dédommagement pour son loyer de 140 francs, devenu 100 francs depuis son mariage avec l’institutrice !

Cette école est, en fait, le logement de l’instituteur, puis du couple, au pied de l’église. M. Trouet sonne tous les matins les cloches de l’église.

A cette époque, il faut noter qu’il n’y a pas non plus de mairie, les réunions se déroulent au domicile du maire. Il faudra attendre 1846 pour avoir une vraie mairie.

En 1833, après la loi  (dont on vient de parler) une ordonnance royale veut obliger les communes à mettre en place des maisons d’école en toute propriété avec une aide éventuelle du département.
Le maire de Noisy, M Dumousseau informe les autorités que sa ville ajourne provisoirement la construction d’une école : trop de dépenses en plus d’une mairie.
La municipalité paie déjà le loyer annuel de l’instituteur.

En 1834, M Dumousseau très intéressé par les questions d’éducation instaure un Programme des Ecoles à Noisy. Nous sommes toujours au pied de l’église, dans l’école primitive des époux Trouet ou plus précisément celle de Mme Trouet ,veuve depuis 6 ans. Elle loue l’autre moitié de l’école à l’instituteur remplaçant de son mari. On a donc toujours 2 classes : une de filles et une de garçons. L’école n’est pas gratuite, les parents paient environ 1franc par mois par enfant.

Chaque classe est divisée en 3 sections :
-section 1: lecture écriture, calcul, rédaction et récitation
-section 2 : lecture et écriture.
-section3 : initiation à la lecture et à l’ écriture.

M Dumousseau voulait calme et ordre dans l’école mais aussi aux entrées et aux sorties où des « grands sérieux » accompagnaient, bien rangés, les élèves chez leurs parents.
Il y avait cours tous les jours sauf le dimanche, les jours de fêtes et le jeudi après-midi.
Les horaires :
-8h 15 : appel
-8h30 : début des cours jusqu’à 11h.
-13h : reprise jusqu’à 16h.30 ( avec 1/2h. de chant à 16h.pour tous)
Noisy fait des efforts pour les enfants indigents, environ 35, à qui la ville offre la gratuité.

Dans la salle de classe, il ne faut pas imaginer des pupitres où seraient installés les élèves
mais une ou deux grandes tables communes autour desquelles sont assis les enfants.
Le maître ou la maîtresse installé, sur une estrade, les fait venir un par un pour une rapide leçon et
les renvoie à leur place avec des exercices à faire. Un bon élève, et de confiance, surveille et aide les plus faibles

Certes la ville de Noisy, en 1833, ajourne la construction d’une école mais vers 1835-38, elle n’a plus le choix . Le logement de Mme Trouet est vétuste et insalubre et M. Dumousseau décide, en 1838, la construction d’une école en face de l’ancienne, rue de l’Église ( sur une partie de l’ancien cimetière) et rue Cottereau, qui donnera son nom à la nouvelle école.
C’est l’architecte d’arrondissement, Paul-Eugène Lequeux qui élabore les plans.

Paul Eugène Lequeux est également l’architecte de la première mairie (illustration ci-dessus),

ce qui nous donne une idée du style que pouvait avoir cette première école.

En 1843, le transfert des deux classes de chez Mme Trouet au nouveau bâtiment est effectif .

-le bâtiment principal au centre se compose de 2 classes, une pour les filles et l’autre pour les garçons, au rez-de-chaussée. Au-dessus un grenier perdu.
– de chaque côté, deux pavillons dédiés aux logements, au 1er étage l’un pour l’instituteur et l’autre pour l’institutrice, desservis chacun par un escalier . Le rez-de-chaussée donne aussi accès aux salles de classes.
Une cour, un préau,un jardin, des latrines sont aménagés . Dans les parties communes, un gros rideau permet de séparer les filles des garçons, tiré selon la nécessité.

Marie-Augustine Blancheteau (1819-1904)

Revenons un peu en arrière sur une jeune élève de Mme Trouet : Marie-Augustine Budor , jeune-fille sérieuse , qui travaille bien et qui aide la maîtresse dans sa classe. En 1833, elle obtient son brevet de 2e degré mais à 14 ans, elle doit, sûrement à regret, quitter l’école ( l’ancienne car la nouvelle n’est pas encore construite), et part aider ses parents dans leurs activités d’agriculteurs . Elle se marie, en 1838, avec M. Blancheteau.
En 1841, la maîtresse (remplaçante de Mme Trouet, partie à la retraite) tombe malade et Marie-Augustine, sollicitée, accepte de la remplacer. En 1842, munie de son Brevet de Capacité d’Enseignement, elle devient officiellement la première institutrice et la directrice de l’ Ecole des Filles de Cottereau.
Elle gagne 200 francs, tandis que son collègue a 350 francs . Il est difficile de donner des équivalences en euros (la fourchette est large au cours du XIXe siècle du franc à l’euro entre
3 et 15 euros).
Les parents paient une rétribution chaque mois, selon l’âge de leurs enfants :
-1fr pour moins de 5 ans.
-1fr50 de 5 à 10ans.
-2fr de 10 à15 ans.
Cette rétribution vient s’ajouter au salaire des enseignants qui, dans les années 1850
s’élève respectivement à 1400 fr. et à 1600 fr.

Dans les années 50, il y a 40 élèves (filles et garçons) qui bénéficient de la gratuité, d’autant plus que la rétribution des parents passent à 2 fr pour tous . Marie-Augustine, l’institutrice, se fait aider de sa fille Eugénie (qui lui succédera en 1870 quand elle prendra sa retraite).

En 1861 l’école est modifiée. En 1863, les élèves sont trop nombreux et les deux instituteurs demandent des adjoints, ce que la municipalité accepte car elle prendra une partie de la rétribution des parents pour les payer .

En 1862 Eugénie Blancheteau aide sa mère en s’occupant d’une classe d’enfants de moins de 5 ans, appelée classe d’asile très vite surchargée ce qui entraîne la création d’une nouvelle école : l’Ecole Béthisy en 1866 .

En 1868, c’est le Certificat d’Etude Primaire. De nombreuses élèves de Marie-Augustine seront les premières à l’obtenir à Noisy.

En 1871, c’est la gratuité pour tous les petits Noiséens (12 ans avant la loi officielle).
L’école propose aussi des cours pour adultes, payés 300f à l’instituteur qui les assure.
A cette époque ,on arrive à des salaires annuels d’environ 2300 fr pour le maître et 1800 pour la
maîtresse.
En 1874, les garçons quittent l’école et s’installent dans la toute nouvelle école Damas ( rue Damas aujourd’hui Brosselette). l’école Cottereau s’agrandit et c’est maintenant Eugénie Blancheteau la nouvelle directrice et institutrice , à la suite de sa mère, partie à la retraite.

1880, date très importante : La loi générale instituant l’Ecole  Laïque, Obligatoire et Gratuite pour tous, est votée.

En 1884, nous avons trouvé un rapport, concernant l’école Cottereau, de la Préfecture de la Seine qui enquête sur l’état des écoles primaires du département,. On y trouve de nombreux détails chiffrés souvent difficilement lisibles, mais on sait qu’il y a 3 classes de filles et 3 institutrices pour 151 élèves dont 4 étrangères, un éclairage suffisant, un chauffage avec des poêles de fonte, 4 lieux d’aisances. pas de vestiaires ni de gymnase mais une bibliothèque de 55 livres et une caisse des écoles.

Melle Blancheteau paraphe le document en concluant ainsi :
« La 2e classe qui occupe l’ancien préau des garçons est insuffisante »

En 1898 , l’école devenue vétuste est détruite et reconstruite.

vue depuis la place de la mairie

Si on regarde l’évolution des budgets consacrés à l’Instruction par la ville de Noisy, on note de constantes et importantes augmentations :

1835 750fr—
1872 8250fr—
1890 S’ajoutent au budget les frais d’achat et d’entretien de fusils scolaires , d’un instructeur militaire et d’un professeur de gymnastique et passe à 12.000fr—
1900 le budget triple et passe à 36.000 fr.

1932 agrandissement de l ‘école Cottereau. Une 10e classe est ouverte.

la cantine dans les années 1940

1944, 18 avril lors du bombardement de Noisy, des écoles subissent des dommages plus ou moins importants mais c’est l’école Cottereau qui a le plus souffert.

Des préfabriqués sont installés dans la cour , et des cours ont même lieu dans des locaux rue St Denis, à l’emplacement de l’actuel bâtiment des impôts. Ci-dessous, photos de classes rue st Denis.

1945, la vie reprend dans les ruines de l’école.

1954-57 l’école est reconstruite.

L’école Cottereau en 2023.

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La plaque du commissariat de Noisy-le-Sec

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Nous allons vous parler de la plaque fixée en façade du commissariat de Noisy-le-Sec.

Nous pouvons y lire : « Le commissariat de Noisy-le-Sec à ses morts pour la France« . Sur cette plaque plusieurs noms. Tout d’abord des déportés morts en captivité : Breheret Georges, Mougenot René et Cousin Albert. Ensuite des fusillés par les Allemands : Gante Bernard et Douret Marcel.

Breheret Georges : déclaré déporté mort en captivité

Gardien de la paix à Noisy-le-Sec, Georges Breheret est né le 31 aout 1895 à Fenou dans le Maine et Loire. Son pseudo dans la Résistance était Lefort, il était agent de renseignements.

Dénoncé pour la détention d’un poste émetteur, il est arrêté dans les locaux du poste de police de Villemomble le 13 novembre 1943, vers 20 h, par les services allemands.

Dans l’après-midi les Allemands s’étaient présentés à son domicile de la part d’un certain « Alain » que Georges dit ne pas connaitre. Avant de partir, les Allemands tirèrent deux ou trois coups de feu en direction de Georges sans le toucher, sûrement pour lui faire peur. Cet incident passé, Georges Breheret ira au poste de police déclarer les faits. C’est là qu’il est interpellé. 

Pendant ce temps sa femme et son fils arrivent à s’enfuir. Le policier avait en fait déposer le poste émetteur chez un voisin. 

Interné à Fresnes puis déporté, il meurt à Mauthausen le 16 mars 1944. Réintégré à titre posthume dans les rangs de la police comme brigadier-chef, Georges Breheret est aussi homologué lieutenant et décoré de la médaille de la Résistance et de la Croix de Guerre.

Mougenot René Alexandre :

Né le 26 décembre 1902 à Paris.

Décédé à Mauthausen.

Recherches en cours. Cote dossier service historique de la Défense AC21P518796

Cousin Albert : matricule de déporté KLB 78182

La famille Cousin vivait au 88 allée Mollien à Pavillons-sous-Bois. Gardien de la paix, il était affecté au commissariat de Noisy-le-Sec.

En 1941 il rejoint la Résistance. Le 15 avril 1944, il est sous-lieutenant FFI du groupe de police « Armor ». Il est spécialisé dans l’hébergement des aviateurs et parachutistes alliés. Il est arrêté  par la Gestapo et interné à Fresnes. 4 mois plus tard, le 15 août 1944, il est transféré à la gare de Pantin pour y être déporté. Un train de 1654 hommes et de 546 femmes prend la direction de l’Allemagne. Les hommes arrivèrent le 20 août à Buchenwald ou ils furent immatriculés et les femmes arrivèrent le le demain à Ravensbrüch.

Buchenwald sert de lieu de transit, Albert Cousin y effectue sa période de quarantaine au camp des tentes du « Petit camp » avant de rejoindre le camp de Dora. Affecté au kommando de travail d’Ellrich, il travaille avec des milliers de détenus au creusement de galeries souterraines ou à des travaux de terrassement de surface. Albert Cousin meurt le 11 décembre 1944 (soit 4 mois environ après sa détention).

Homologué FFI et déporté interné résistant, le nom d’Albert Cousin a été gravé sur la stèle du commissariat de Noisy-le-Sec au côté de ses collègues.

Dans cette seconde partie, nous étudierons le sort des fusillés par les Allemands.

Douret Marcel : fusillé par les Allemands.

Né le 25 novembre 1913 à Monthermé dans les Ardennes, il a été exécuté le 16 août 1944 à la cascade du bois de Boulogne, Paris 16ème.

Gardien de la paix, membre du Mouvement de la Libération Nationale, des Forces Françaises Combattantes et des Forces Françaises de l’Intérieur FFI.

 

Le 13 octobre 1934 il est incorporé dans le 16ème bataillon de chasseurs à pied à St Avold dans les Vosges. Il est libéré avec le grade de caporal. Il demeure au 16 rue des Glycines à Gagny. Il épouse Marguerite Chapin, le couple demeure par le suite au 19 rue de la cote des Levants à Villemomble.

Il entre dans la police le 23 mars 1938, il est affecté au commissariat de Noisy-le-Sec. Août 1944, des résistants de différents groupes (FFI, FTP de Chelles, des Jeunes Chrétiens Combattants et de l’organisation civile et militaire) se préparent pour réceptionner 3 tonnes d’armes qui allaient tomber du ciel. Malgré une mise en garde de l’entourage du Dr Henri Blanchet (capitaine FFI) suspectant ce largage, malgré cet avertissement l’opération se poursuit.

En fait, ce groupe de résistants avait été infiltré par Guy Glèbe d’Eu alias Guy de Montreuil, chef de groupe de la Gestapo installée rue des Saussaies à Paris et de Karl Rehbein du service des renseignements de la SS. Gye de Montreuil parlant sans difficulté plusieurs langues, se fit passer pour un capitaine anglais prénommé Jack. Il avait ainsi réussi à infiltrer le réseau.

Le 16 août 1944, vers 8 heures du matin, Marcel Douret  et Bernard Gante également gardien de la paix, dont le nom figure également sur la plaque du commissariat, participent à l’escorte du camion devant aller chercher les armes pour les résistants. L’opération était commandée par le Dr Henri Blanchet chef des FFI et FTP de Chelles et Jean Favé chef de groupe FFI de Gournay.

Près d’une cinquantaine de résistants, dont une vingtaine âgés de moins de 20 ans, sont répartis dans deux camionnettes et une ambulance. Jack et un de ses complices les attendent au RV fixé à la porte Maillot à l’angle des rues St Ferdinand et de la Grande Armée. Le convoi va à quelques rues de là empruntant vers 11h30 la rue d’ Amaillé et entre au 11bis dans un grand  garage.

Aussitôt les véhicules sont cernés par une trentaine de SS et d’hommes de main en civil commandés par le lieutenant SS Walter. Ils tirent sur les résistants et capturent 34 d’entre eux non armés.

Ils seront emmenés avenue Foch, rue Leroux et rue des Saussaies où ils seront interrogés sous la torture. Le lendemain matin on relèvera 7 cadavres devant l’immeuble du 14 de la rue Leroux.

Dans la soirée du 16 août 1944, des bruits retentirent près de la cascade du bois de Boulogne, la Gestapo exécutait et massacrait à la mitrailleuse et à la grenade les 34 hommes dont Marcel Douret. Le corps du Dr Henri Blanchet abattu de 4 balles de révolver par des gestapistes rue Victor Hugo, fut déposé à côté des cadavres. Ils seront exposés dans un garage de la rue Chardon-Lagache où les familles viendront les identifier.

Guy Glèbe d’Eu, alias Jack, responsable d’une centaine d’arrestations notamment des exécutions de la rue Leroux et de la cascade du Bois de Vincennes, comparut le 2 avril 1949 devant la cour de justice de Paris. Condamné à mort, il fut passé par les armes le 20 avril au fort de Montrouge.

Marcel Douret, inhumé le19 août 1944 au cimetière de Bagneux, exhumé le 2 octobre, une cérémonie religieuse se déroula dans l’église de Villemomble, puis réinhumé dan s le caveau familial au cimetière de Gagny.

Il fut déclaré « victime du devoir » cité à l’ordre de la Nation, décoré de la Légion d’Honneur à titre posthume, homologué FFI et membres des Forces Françaises Combattantes.

Son nom figure sur les stèles du commissariat de Noisy-le-Sec, de la Cascade du Bois de Boulogne, sur la liste des morts pour la Libération de Paris au musée de la Police et sur le monument aux morts de Villemomble. Une rue porte son nom. Son nom est inscrit sur le mémorial de la Résistance ardennaise de Berthaucourt à Charleville-Mezières dans les Ardennes.

Postérité : la scène est décrite dans le film Paris brûle t-il ? avec Jean-Louis Trintignant dans le rôle du capitaine Serge, l’agent double qui piège les résistants et notamment Michel Sardou et Patrick Dewaere qui font de la figuration comme résistants.

Retrouvez les noms des 35 résistants massacrés à la cascade du Bois de Boulogne le 16 août 1944 sur https://memoire-histoire.fr/2018/09/08/les-fusilles-du-bois-de-boulogne/

 

Admira et Jean-Raymond Marqueteau

 

 

 

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Noisy-le -Sec noeud ferroviaire

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Dès l’origine des chemins de fer en France, l’armée a veillé sur leur utilité stratégique.

La loi de 1842 visait à relier Paris à toutes les frontières du pays d’où la création des grandes lignes radiales pour le réseau Est :

-ligne Paris Strasbourg (tronquée à Avricourt depuis la guerre de 1870) dite ligne PA (avec la ligne Paris Charleville détachée à Trilport après Meaux).

-ligne Paris Belfort Mulhouse (tronquée à Montreux Vieux, gare frontière avec l’Empire allemand).

La séparation des deux lignes a lieu à Noisy-le-Sec au kilomètre 9.

(Rappel des mises en service : 5 juillet 1849 de Paris à Meaux, 7 juillet 1856 de Noisy à Nogent et l’année suivante de Nogent à Flamboin le 25 avril 1857).

Pour compléter l’ensemble beaucoup de lignes transversales direction sud-ouest nord-est pour amener les troupes de l’intérieur (exemples Orléans Chalons, Lérouville Sedan, Saint-Dizier Gray).

En prélude à l’exposition universelle de 1889, la Compagnie des Chemins de Fer de l’Est prévoit de grands aménagements pour Noisy-le-Sec :

-création d’un dépôt et d’ateliers du matériel pour dégager les installations existantes à Paris

-création d’un triage en lien avec la Grande Ceinture, ouverte depuis 1882, et d’une gare d’échanges 

-création de gares Grande Vitesse et Petite Vitesse

Ces projets ont été réalisés par étapes avant 1914.

Le dépôt prévoyait 3 rotondes. Il sera ouvert le 1er juin 1892 (les structures métalliques ne sont pas dues à Eiffel mais à l’ingénieur Müntz de la Compagnie de l’Est).

La gare voyageurs avec 3 corps de bâtiment date de 1909, analogue à celle de Pantin.

La gare primitive convertie pour les marchandises a été démolie au printemps 1962.

Vue ci-dessus donne une idée de l’ensemble, la passerelle va jusqu’aux voies de la Grande Ceinture (à droite).

Il est question de prolonger celle existant aujourd’hui lorsque le tramway de la Tangentielle Nord sera prolongé jusqu’à Noisy

Devant l’importance du trafic, de grands travaux ont été entrepris pour séparer les courants de trafic en liaison avec les sauts de mouton de Pantin. A partir de 1911, Noisy connait la situation actuelle :

-voies impaires au nord (Paris province)

-voies paires au sud 

Le rôle de noeud ferroviaire apparaît nettement sur le carnet des marches types de 1935.

Les voies paires à partir de Bondy passent sous celles de Belfort mais aussi sous celles de la Grande Ceinture (voies 1 et 2 GC)

Les voies impaires ont été reliées à celles de la Ceinture pendant la guerre 14-18 pour faciliter les transports militaires (pour éviter des rebroussements). Devant leur utilité, ces raccordements ont été maintenus. D’ailleurs le trafic sur la Ceinture a nécessité la création de la ligne complémentaire en 1928 dite : « évite Noisy » car si elle ne dessert pas le noeud du triage, elle traverse néanmoins notre commune en surplomb (ponts rue d’Alsace Lorraine, rue Baudin, rue Galliéni) et se raccorde à la ligne de Belfort à la limite de Rosny, et à celle de Strasbourg après les garages de Villemomble au « triangle de Gagny ». Un service voyageurs a existé sur la Ceinture jusqu’en 1939.

La vue ci-dessus montre bien la séparation des voies paires et impaires à l’ouest de la gare juste avant le second conflit mondial.

Noisy était aussi un centre autorails, vocation qu’il conservera jusqu’en 1969

Les vues ci-dessous donnent une idée de la reconstruction. La nouvelle rotonde de type P comportera 46 voies couvertes. Elle sera démolie en 1976. Le nouveau pont au-dessus des voies ferrées permettra le fameux « alignement » (dont les dernières réalisations ne se feront qu’en 2003 lors de la réalisation du tramway)

 

La gare actuelle qui conserve la partie occidentale de l’ancienne n’a été mise en service qu’en 1955

Enfin curiosité, la construction pour l’entretien des autorails d’un grand bâtiment la « cathédrale » dans la deuxième moitié des années 1950. Il sert aujourd’hui d’atelier pour le chantier transconteneurs (photo ci-dessous)

Christian FONNET

 

 

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L’avenue Marceau, grande et petites histoires

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Autrefois, chemin des Petits Noyers parce qu’il était bordé de nombreux noyers, dit aussi quelquefois au 18e siècle Chemin des Processions du Saint Sacrement, qu’il ne faut pas confondre avec le chemin des Processions de St Marc (actuelle rue des Processions) qui se situe en haut de Noisy à la limite de Montreuil. Le quartier traversé par l’avenue Marceau est encore aujourd’hui appelé « Les Petits Noyers ».

L’intersection de l’avenue Marceau et du boulevard Michelet ne prend le nom de « Rond-Point des Petits Noyers » qu’au 17e siècle : les noyers se plantaient souvent isolés au milieu des champs mais on les exploitait aussi en les plantant à intervalles relativement rapprochés formant ainsi de véritables futaies. Les gelées de 1889 ont détruit ceux qui avaient échappé à l’hiver 1870-71. Un calvaire se voyait autrefois à l’intersection de cette voie avec le Chemin du Bas de Noisy à Merlan (actuellement rue Denfert Rochereau).

Côté Denfert Rochereau, sur l’immeuble qui fait l’angle des 2 rues, on peut voir une plaque portant l’ancien nom de cette rue « Chemin du Bas de Noisy à Merlan »

Il y exista un lieu de sépulture remontant peut-être aux Mérovingiens.

Depuis le 3 novembre 1888 elle porte le nom du Maréchal d’Empire François Séverin Marceau.

Bref historique : né à Chartres en 1769. Dès la prise de la Bastille il entre dans la Garde Nationale sous les ordres de La Fayette. Général, il combattit les Vendéens (victoires du Mans et de Savenay, 1793) puis les Austro-Hollandais à Fleurus (1794). Il battit les Autrichiens à Neuwied (1795), mais en 1796, alors qu’il assurait la retraite des troupes françaises, il fut blessé à mort. Il est resté célèbre pour son humanité et son courage.

Maintenant parcourons la rue qui démarre au carrefour des rues Pierre Brossolette, Moissan et Adrien Damoiselet, nous irons du n°1 au n°133 à la suite, numéros pairs sur le trottoir de droite et impairs sur celui de gauche.

Il y a très peu de commerces (il y en avait un peu plus dans les années 60) qui se concentrent principalement avant le Rond-Point des Petits Noyers, quelques immeubles mais surtout des pavillons.

Nous nous arrêterons sur ceux qui ont un intérêt particulier et pour lesquels nous avons des informations et commentaires.

1 – une teinturerie en 1962 – nom Mendousse, toujours existante en 1969

Au même numéro 1 un petit immeuble où a habité Louis Jojot, figurant au cinéma, dont je vous avais parlé en 2021

En 1991 chauffage central M. Pavion

2 – immeuble faisant l’angle de l’avenue Marceau et de la rue Moissan

Une adhérente Micheline Virey nous envoie ce texte que je vous lis :

« Oui je demeurais au 2 avenue Marceau, j’y suis même née ! (la plaque commémorative n’est pas encore posée mais peut-être qu’un jour !!)

entrée gauche de l’immeuble, au 3ème étage, mes parents y sont arrivés en 1935, pour moi c’était « Ma maison », j’étais la seule enfant dans l’immeuble et je dois dire que j’ai été très gâtée par mon entourage, les dames âgées étaient mes amies, me tenant lieu de grands-mères qui m’ont fait défaut.

En 1956 j’avais 16 ans, mes parents se sont alors installés dans l’appartement du rez-de-chaussée, qui comportait une petite pièces supplémentaire, ma première chambre, formidable ! En 1962 un appartement se libère au 2ème étage, je suis alors mariée, maman … nous l’occupons pendant 7 ans en y apportant un peu plus de confort. En 1971 nous le quittons par nécessité. Après avoir vécu quelque temps dans un autre quartier sans m’y habituer, nous faisons l’acquisition d’un grand appartement, au 2ème étage de la petite copropriété du 3 avenue Marceau où nous avons passé de très belles années de 1973 à 1999, si bien que j’ai passé 60 ans de ma vie au même endroit, c’est pourquoi je suis restée si attachée à Noisy.

Je joins 2 photos (collector) du 2 avenue Marceau en 1935 environ, sur l’une ma mère et ma sœur à la fenêtre de notre appartement, sur l’autre côté rue Moissan mon père à vélo, devant la voiture, dommage, la photo n’est pas très bonne. »

4 – en 1991 un garage M. Bigrat.

5 – en 1956 un volailler M. Guibal, toujours là en 1969, ensuite, sans date, une boutique d’affûtage d’outils de coupe pour machines-outils

6 – en 1956 jusqu’au moins 1969 un tourneur repousseur sur métaux – M. Halope

10 – maison d’habitation du frère de Louis Jojot, Directeur des cinémas de Noisy et Bondy, pavillon toujours existant où se tournent régulièrement des séquences de films et séries télévisées

13 – Maison très fleurie qui a gagné de nombreuses fois le concours des plus belles maisons fleuries

20 – en 1956 un fleuriste M. Buzy, toujours là en 1962

24 – en 1953 une épicerie M. Mullot, en 1969 toujours l’épicerie au nom de M. Tirel

Transformé en local électoral dans les années 2000

Rond-Point des Petits Noyers

Boulangerie

En 1956 M. Hebert, en 1962 toujours M. Hebert, en 1969 M. Robin, en 1991 M. Ferreira

Encore un boulanger à ce jour

A côté du boulanger, un café, en 1956 au nom de M. Laborie, en 1962 dénommé « Le Petit Bar », au nom de M. Cusin, toujours sous le même nom en 1936

Toujours un bar à ce jour

Ces 2 commerces sont répertoriés au 41 boulevard Michelet

Nous traversons le Rond-Point des Petits Noyers et entamons l’autre portion jusqu’au Rond-Point de Merlan, baptisé Rond-Point du 11 novembre 1918, nom donné en 1965, mais beaucoup de personnes l’appellent toujours « Rond-Point de Merlan ».

20 – carte postale trouvée sans date

34 – Pavillon construit par l’entrepreneur GENETE, ayant appartenu à M. Rivoire, maire de Noisy de 2010 à 2020

Ensuite 2 pavillons avec noms inscrits sur les façades :

 

36 – « Villa des Glycines » artisan électricien parti en retraite en Asie du Sud Est

 

38 – « Le Petit Noyer » appartenait à Ghislaine Carlé, a quitté Noisy il y a une dizaine d’années

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

47 – Eglise Luthérienne St Marc

 En 1952 Noisy fut la première ville de la région parisienne (et probablement de France) qui reçut « la permission de faire le prêche », grâce à la bienveillance de Tristan de Rostaing, seigneur du lieu et à l’esprit de tolérance de nos lointains concitoyens.

En 1576, la célébration de leur culte étant interdit à Paris, les protestants parisiens vinrent à Noisy pour célébrer une cérémonie religieuse, mais à leur retour il furent condamnés à payer une amende. Nous ne savons pas le lieu exact où se déroula cette cérémonie, mais nous savons où les Huguenots se réunirent ultérieurement : en 1865 c’était rue Saint-Denis, en 1871 dans un petit temple situé rue de la Forge (actuelle rue Jean Jaurès)n en face de la rue St Jean, de 1886 à 1897 vers le 75 de la rue Saint-Denis et de 1891 à 1900 au 38 rue Denfert-Rochereau.

En 1840 l’église luthérienne ne possédait à Paris qu’un seul lieu de culte : l’église des Billettes, rue des Archives, desservie par 3 pasteurs. En 1935 elle y possédait, ainsi que dans la banlieue, 16 églises dépendant du consistoire et 10 autres attachées à la Mission intérieure fondée en 1840.

L’église de Pantin-Aubervilliers, installée vers 1876 était une œuvre de cette Mission intérieure et c’est en 1923 que le Pasteur Fred Christol qui la desservait entreprit de transférer la salle d’évangélisation de Noisy dans un local mieux approprié d’aspect plus religieux, voire d’édifier si possible un temple imposant.

Huit années d’efforts persévérants lui permirent d’assurer la construction avenue Marceau d’un bâtiment à usage de presbytère avec un oratoire convenable. Ce bâtiment n’est que l’amorce d’un édifice beaucoup plus important qui comportera une vaste et belle église, comme le montre la photo.

Le 21 juin 1931 avait lieu la cérémonie d’inauguration et la dédicace du nouvel oratoire. L’inspecteur ecclésiastique Appia présidait cette solennité. Un cortège, dans lequel avaient pris place l’inspecteur Bach, les Pasteurs de l’église luthérienne de Paris (consistoire et mission intérieure), les Conseillers presbytériens de Pantin-Noisy, le Maire de Noisy ainsi qu’une délégation du Conseil Municipal, se forma dans le presbytère et se dirigea vers le nouveau sanctuaire. Les vases de communion et la Sainte Bible furent solennellement portés par les pasteurs jusque sur l’autel orné de fleurs Le pasteur Guental, nouveau titulaire de la paroisse, assurait la partie liturgique, suivant le formulaire en usage dans l’Eglise Luthérienne.

L’inspecteur ecclésiastique Appia apporta les messages et les vœux fraternels de l’Eglise et procéda à l’acte de consécration et de dédicace en présence du pasteur Fred Christol, ancien missionnaire et pasteur de l’Eglise de Pantin-Aubervilliers-Noisy, retraité depuis six mois, qui voyait ce jour, dans la consécration du nouvel édifice, le couronnement de ses persévérants efforts.

49-51 – J. Fournier – importation et exportation de denrées alimentaires (voir photo)

Selon un numéro du Bijou de 1923 cette même société était aux numéros 131/133 déjà av. Marceau

51 – Ancienne résidence de J.L. Mons, maire de Noisy de 1995 à 2002

52 – En 1969 M. Petit, couverture, plomberie, chauffage individuel jusque dans les années 70

51bis – Famille Ferez, fromager sur le marché pendant de nombreuses années et ensuite dans une boutique rue Jean Jaurès.

 

53 – Maison construite par l’architecte André Dargent – Architecte de Villemomble (plaque sur la maison)

Ayant appartenu à Roland Toulet, Président du Tir à l’Arc pendant de nombreuses années, qui a quitté Noisy il y a quelques années

65 – Notre lieu de résidence, maison datant des années 20, acquise en 1933 servant à l’époque de maison de campagne pour les grands-parents résidant à Paris, un avion Lancaster s’y écrasa au fond du jardin la nuit du bombardement du 18 avril 1944. La maison n’a pas été détruite mais très ébranlée

 La maison actuelle est une reconstruction de guerre, la cave et les fondations sont celles d’origine.

80 – Groupe scolaire d’Estienne d’Orves comprenant une partie école élémentaire et une partie école maternelle qui, elle, donne sur la rue Denfert Rochereau.

Suite au bombardement du 18 avril 1944, le plan de reconstruction et d’aménagement de la ville de 1945 prévoit la construction d’une école dans le quartier de Merlan. Dans l’attente de la réalisation du projet, les premières classes en préfabriqué (appelées « classes wagon » à cause de leur forme) sont posées en 1947 sur un terrain situé entre l’avenue Marceau et la rue Denfert Rochereau. Dans la continuité, la municipalité poursuit les expropriations afin de permettre la construction des bâtiments en dur.

Lors de sa mise en service en 1949-1950, l’école maternelle comprenait alors 3 classes, 2 vestiaires, 1 préau et des WC extérieurs. Avec le développement des usines, en particulier la Bonneville et l’extension de la SNCF, le conseil municipal a demandé rapidement un projet d’amélioration de la maternelle Marceau pour être en mesure de suivre l’évolution de la population enfantine.

La construction du groupe scolaire se fait de 1956 à 1962.

Agrandissement de l’école de 1959 à 1963

Rénovation de 1958 à 1968

Il fut rebaptisé en 1958 Honoré d’Estienne d’Orves et le 5 décembre 1971 eut lieu une cérémonie rappelant le sacrifice d’Honoré d’Estienne d’Orves, Lieutenant de Vaisseau, fusillé par les Allemands au Mont Valérien en 1941, mort pour la France. A cette occasion une plaque a été apposée.

Les derniers chiffres datant de la rentrée 2021 font état de 390 élèves du CP au CM2

Sur 11 écoles publiques que compte la commune, l’école d’Estienne d’Orves est la 2ème école la plus demandée de la ville, la première étant l’Ecole privée Ste Croix.

1954

1958

90 – Vue sur Google map « Ecole Manoa » – fermé temporairement

91 – 1956 – Beghain, menuiserie – toujours là en 1969

Angle rue Chanzy/av. Marceau – Epicerie et Garage Ribot, grand mécène des courses cyclistes qui passaient, entre autres, avenue Marceau et qui à cette occasion prêtait une voiture pour le directeur de course

110 – en 1923 Entrepreneur de maçonnerie Cochu & Fils

114 – Pâtisserie Monti, pas de date de création, toujours active en 1997 selon un calendrier au dos de la photo 

118 – Boxes automobiles, disparus au profit d’un projet immobilier, apparemment en suspens depuis plusieurs années et qui a servi depuis comme décor pour un film (atmosphère de terrain vague ?)

119 – Maison d’habitation d’Eddy Mitchell pendant de nombreuses années

124 – en 1923 Fumisterie Polini

125 – en 1994 cette maison a servi de décor pour un épisode de la série télévisée « Placé en garde à vue » 29 épisodes de 52 mn avec comme acteur principal Serge Lama qui jouait le rôle d’un commissaire Victor Paparel, dont la première diffusion eut lieu le 18/06/1994 jusqu’en 1995 le soir à 22h sur la 3 puis sur la 2, le vendredi soir après Thalassa

Pourquoi cette maison : parce que le fils Moine (fils d’Eddy Mitchell) faisait partie de l’équipe de tournage

A l’angle de l’avenue Marceau et de la rue de Merlan : un café « Le café du Rond-Point »

Avant c’était une Pizza

Nous arrivons au Rond-Point de Merlan, fin de notre balade

Chantal & Bernard Boivin

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18 avril 1944, « plus rien mais vivants ! »

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Françoise Marcelin-Gascoin, nous livre le récit de cette nuit tel qu’il lui a été transmis par ses parents Marie-Thérèse et Lucien. La famille habitait un pavillon au 19 avenue de Strasbourg.

Les photos avant la nuit du 18 avril 1944

26 mai 1943, Anne-Marie, 1 mois, dans les bras de sa maman Marie-Thérèse Marcelin née Simoutre, devant le pavillon en pierres meulières.

2 avril 1944, à l’arrière plan, les voies ferrées. Anne-Marie dans les bras de ses parents Marie-Thérèse et Lucien.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le récit de Françoise

Depuis plusieurs jours et nuits, les sirènes se succèdent. Maman et Papa prennent ma soeur Annie, 1 an, dans leurs bras, et un minimum d’affaires, courent jusqu’à la cave de l’immeuble voisin, abri en cas de bombardement (au n°15).

Papa ne voulait même plus y aller puisque ces alertes restaient sans suite.

Le 18 avril au soir, ils s’y précipitent. Quelques bougies éclairent une huitaine de personnes. Soudain le propriétaire de l’immeuble (Henri Brussat), remonte pour couper l’arrivée du gaz. Il ne reviendra pas. L’immeuble s’écroule.

Cécile et Henri Brussat tous deux décédés lors du bombardement.

avenue de Strasbourg

Les pilotes des forces alliées, de 6000 mètres, visaient les convois ferroviaires d’armements allemands. Ce sont les habitations de l’avenue de Strasbourg qui furent détruites. 

19 bld de Strasbourg

Une énorme pyramide conique de gravats recouvre l’abri où l’on ne trouve qu’une barre à mine que les plus jeunes manieront à tour de rôle. L’oxygène se raréfie, les bougies ne peuvent plus brûler. Le 3ème jour, les secouristes entendent les percussions de la barre enfouie. Ils s’activent et l’on entend un grand sifflement : c’est l’air qui entre enfin dans la cave.

Du petit pavillon de nos parents, il ne reste que l’escalier intérieur. Papa y trouvera les seuls rescapés, une bouteille d’eau de vie, faite par grand-père, datée du mariage de maman et papa… et un pot de confiture.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Maman écrit à sa soeur « Plus rien mais vivants. A bientôt. Baisers« .

Papa, instructeur à l’apprentissage SNCF est réquisitionné. Il ne reste rien des locaux ni du dépôt de locomotives. Il doit partir pour Varennes Jaulgonne, préparé l’arrivée des jeunes dans un bâtiment libre.

Plus aucun train ne circule. Maman couche Annie dans la poussette qui n’a plus que 3 roues vers la Lorraine de son papa. Un camion l’invitera à faire le voyage.

S’en suivent 11 ans avant la reconstruction d’une maison plus petite. Famille séparée car la crise du logement à Paris est énorme. Famille réunie dans un minuscule appartement sans soleil ni aucune commodité. Nos frère et soeur jumeaux y naisent (Georges et Catherine le 16 décembre 1952). Annie part chez la soeur de maman. Je pars chez mes grands parents.

On ne peut que penser aux bombardements actuels. Quel courage il faut pour réparer toutes ces maisons, toutes ces histoires douloureuses !

Françoise Marcelin-Gascoin, Georges et Catherine Marcelin

Remerciements à Dorothée pour la mise en contact.

 

 

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18 avril 1944, la petite fille à la bombe se souvient

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Eliane Tellier, née Rainbeaud avait 10 ans le 18 avril 1944. Elle habitait avec sa famille au 32 rue Anatole France et fréquentait l’école Cottereau.

« La première bombe est tombée à l’angle de la rue Anatole France et de la rue Hélène. Mon père était journaliste/photographe de presse comme il ne voulait pas travailler pour les Allemands, il avait trouvé un petit boulot à la gare. Il y a eu l’alerte et il a regagné la maison en vitesse. Il a trouvé ma mère sur le pas de la porte, avec ses 2 filles, un peu désemparée. Nous sommes descendus dans la cave et là le bombardement à vraiment commencé. Dans la cave, avec mes parents et ma sœur Jacqueline, il y avait des amis qui habitaient avenue de Rosny et qui étaient venus se réfugier là en pensant que c’était plus sûr. J’ai prié le bon Dieu pendant tout le bombardement. Cela m’a paru très long. Ma sœur, elle, a dormi pendant tout le bombardement.

Les pompiers nous ont aidé à sortir de la cave et nous ont emmené rue Béthisy. En passant devant l’actuelle Galerie, il y avait un trou immense. C’est là que j’ai eu peur. Il y avait des gens en sang sur des civières. Je ne sais combien de temps nous sommes restés là. Puis nous sommes partis à pied à Pantin. Il y avait, près de la pharmacie place Jeanne d’Arc, un hôtel en feu. Çà pétait de partout. On était en chemise de nuit et en chaussons.  Nous avons été accueillis dans un premier temps chez des amis à Pantin puis dans la famille de ma mère à Paris.

La maison a sauté après à cause d’une bombe à retardement. Il a eu beaucoup de bombes à retardement. Mes parents sont revenus à Noisy pour récupérer quelques affaires dans les ruines. On a vécu à Noisy dans un vieux pavillon délabré, c’est tout ce que mes parents avaient trouvé mais c’était déjà çà.

la famille Rainbeaud dans les ruines de son pavillon

On a vécu là alors que ma mère attendait mon petit frère. Ma mère a été voir le maire et a fait un scandale pour obtenir un relogement dans les maisons préfabriquées. On a eu un pavillon tout meublé, tapis, rideaux. C’était une maison américaine au 10 avenue du Général Leclerc, c’était beau ! Au numéro 7, en face, il y avait une maison française et là habitait la famille Tellier et c’est comme çà que j’ai connu mon mari. »

La photo : Eliane (au premier plan à droite) n’en a aucun souvenir. C’est une mise en scène de son père André journaliste-photographe. Une seule certitude, nus sommes à Noisy… si quelqu’un à des infos…

propos recueillis par Anne-Marie Winkopp, le 21 mars 2024 à la maison de retraite st Antoine, Noisy-le-Sec

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1944, le carnet bleu, témoignage de Robert Pacaud

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Souvenirs du 18 avril 1944 par Robert Pacaud (20 ans en 1944), habitant 17 rue Baudin à Noisy-le-Sec. Texte mis en forme en 1994 à l’occasion du 50ème anniversaire de la Libération de la France à partir de notes prises pendant les 2 semaines qui ont suivi le bombardement sur un petit carnet bleu. Photocopie du carnet mis aimablement à disposition à notre disposition par son dernier descendant, Philippe Caillaud.

Ce récit date de l’occupation allemande.

Un soir avec mon copain de quartier Maurice Pomme, sa bonne amie Colette et Monsieur Martin son père qui était veuf, nous allâmes au cinéma. En ce temps-là il y avait d’abord un petit film (documentaire en général ou un dessin animé) suivi d’un intermède pendant lequel un artiste se produisait. C’est ainsi que je vis de près, Tino Rossi (qui sans micro n’avait qu’un filet de voix) et Marcel Azzola l’accordéoniste qui allait devenir célèbre.

 Je ne me souviens pas du film, mais seulement de l’air de musique qui accompagnait la sortie des spectateurs. Annie Cordy l’a inclus quelques années plus tard dans son répertoire et c’est ainsi que j’ai appris que c’était la musique d’une chanson allemande ‘Bier und Liebe

Nous avions juste le temps de rentrer dans nos logis respectifs avant le couvre-feu, fixé à 23h30.

Arrivés à l’angle de l’avenue Jean-Jaurès, la rue principale qui traverse quasiment Noisy en ligne droite de Romainville à Bondy et de la rue de l’Union, où habitait les Martin au numéro 2, devant le pan coupé où l’on entrait de jour, dans l’enceinte de la poste, nous échangions quelques mots avant de nous séparer, quand retentirent les hurlements de la sirène d’alarme aérienne ; on disait l’alerte.

Aussitôt d’une seule voix nous criâmes ‘c’est pour nous’ car toute la journée la rumeur avait couru qu’un message de Londres de la veille au soir, parlait de noix et les armes de la ville en comportaient trois. La déduction s’imposait d’elle-même.

En effet quelques instants après, on entendit des bruits de moteurs d’avion et rapidement la nuit fut brillamment éclairée et les maisons aussi évidemment, surtout au-dessus de la gare toute proche, par de nombreuses fusées éclairantes appelées ‘chandelles’ qui descendaient lentement vers le sol.

Le bombardement de l’important nœud ferroviaire que constituait le dépôt de Noisy avec ses nombreux quais, ses dépôts, ses triages qui s’étendaient jusqu’à Pantin, ses ateliers, ses rotondes, les matériels roulants de toutes sortes, allait commencer ; exécuté par les alliés américains, couverts par la chasse anglaise e

Cela dura 20 minutes.

20 minutes d’un chaos effroyable de bruits divers, plus violents les uns que les autres dans un paysage nocturne de lueurs plus éblouissantes les unes que les autres. Monsieur Martin réagit immédiatement à l’apparition des chandelles, et nous entraina nous terrer dans la cave, elle-même semi enterrée avec des soupiraux au niveau du sol naturel.

Je fermais la marche mais au lieu de les suivre dans le couloir avec au bout l’escalier qui descendait à la cave, je me retournais, en tenant la porte d’entrée à moitié refermée sur moi, pour regarder le ciel à droite puis à gauche de l’immeuble qui me faisait face dans cette rue de l’Union très étroite.

Ce que je voyais était tellement extraordinaire que je ne pensais à rien.

C’était magnifique et je ne réalisais pas que cette magnificence était mortelle.

La Flak (DCA allemande) composée principalement de canons de 105 montés sur des wagons plats disséminés dans l’énorme complexe que formait le dépôt, se dépensait avec énergie pour tenir sa partition au mieux, dans le concert des sifflements de bombes de 250 et 500 kg qui explosaient en arrivant au sol.

C’était dangereux mais j ‘avais devant mes yeux de 20 ans, la démonstration réelle de ce que j’avais pu lire dans certains livres, en particulier ‘Verdun ‘.

A plusieurs reprises, des chutes de bombes proches, m’envoyèrent leur souffle, mais j’étais subjugué par l’ensemble du spectacle. J’ai entendu enfin, la voix de quelqu’un qui avait remonté l’escalier de la cave, qui hurlait des mots dont je ne compris qu’un seul : Robert : mon prénom.

Dans le même temps, je me décidais à bouger pour rentrer, quand une explosion tout proche domina un instant, le concert et son souffle repoussa la porte et la claqua contre le mur, la déglinguant complètement et m’envoyant du même coup quasiment sans toucher le sol, jusqu’au bout du couloir, où j’eu le réflexe de mettre mon bras gauche en position de butoir pour pivoter à 90 degrés, enfilant ainsi en descente ultrarapide, l’escalier menant à la cave.

L’immeuble qui l’instant d’avant était devant moi, venait de recevoir sa bombe.

Diverses exclamations m’accueillirent, pas tellement chaleureuses Il y avait là dans cette partie de la cave, les occupants des trois niveaux de l’immeuble qui ne comportait qu’un appartement par niveau. Plusieurs personnes étaient debout, mais la plupart étaient assises par terre devant un mur.

Je me souviens que mon copain Pomme m’engueula copieusement tout en maintenant sur sa tête une pelle à charbon privée de son manche, sa fiancée Colette serrée contre lui, tremblant de tout son corps.

J’allais d’un soupirail à celui d’en face, pour essayer de voir encore quelque chose, tout en racontant d’une façon décousue ce que j’avais vu. Je constatais que Monsieur Martin debout immobile, était le seul auditeur qui me sembla valable, bien que son visage parût un peu hébété, ce qu’il me confirma bien plus tard. Il ne se rappelait plus : il revivait un épisode de la guerre de 14 qu’il avait fait.

Les 20 minutes s’écoulèrent, longues de chacune 60 longues, longues secondes.

Le bruit des avions cessa et par la suite, celui de la DCA.

Seules les bombes à retardement se faisaient entendre. Leur concert dura plusieurs jours : dans la première heure puis irrégulier au fur et à mesure que le temps s’écoulait. Ensuite les exposions se succédèrent au ralenti, ou très près ou assez voire même très loin. Puis, les artificiers étant au travail, on entra si j’ose dire, dans la routine journalière On savait que les bombes qui explosaient ne tuaient plus.

 L’accalmie relative qui succéda au bombardement, fini par nous faire réaliser que nous avions été épargnés miraculeusement, car notre position géographique était quasiment au cœur de ce qui fut (mot illisible).

Tout le monde parlait en même temps, quand quelqu’un s’écrit : ‘ça sent le brulé’. Et aussitôt de remonter précipitamment en haut, en se bousculant dans le petit escalier de la cave. Dehors la nuit avait des lueurs d’incendies tous azimut. Des ombres couraient déjà, dans des directions opposées.

Nous constatâmes une fois sur le terrain, où la rue encombrée de débris provenant de l’immeuble d’en face auquel il manquait une tranche, effondrée principalement dans le sous-sol, que le toit de notre immeuble brulait.

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rue de l’Union

Le constat d’incendie de la toiture reconnu, mon copain Maurice en tête (qui se révéla à partir de ce moment-là un véritable homme d’action) tout le monde pénétra dans l’immeuble sans prendre le temps de se faire des politesses et chacun s’affaira dans son appartement.

Monsieur Martin habitait malheureusement au troisième étage. Le toit brulait, les plafonds commençaient à crever, laissant tomber dans les pièces, des morceaux enflammés qui communiquaient eux même le feu, à l’appartement. Au début on en éteignit quelques petits, mais Maurice galvanisa son monde en l’occurrence Monsieur Martin, Colette et moi, en donnant des ordres précis. Les fenêtres furent ouvertes et chacun s’occupa d’une pièce, après avoir fermé la porte.

 D’abord jeter les couvertures, sommiers, puis les vêtements, pris à grandes brassées, les tentures s’il y en avait, puis les tiroirs complétés par des objets exposés ou accrochés, venaient franchir la fenêtre, pour tomber si possible, sur les matelas, ou les vêtements, puis les chaises, les petites tables et les objets divers à qui on donnait leur chance. Maurice installa d’office dans mes deux mains croisées au bout de bras verticaux, une pile d’assiettes, qu’il appuya jusqu’à mon menton pour la coincer. Et direction, la cour en bas ! L’escalier était libre mais c’était vachement lourd et instable. Il n’y avait plus d’électricité, je ne pouvais pas voir les marches. A partir du premier étage, l’escalier était très encombré, et je fus souvent bousculé. Les assiettes furent cependant sauvées, et servirent pour le mariage en septembre.

Là-haut l’appartement brulait un peu partout, et les 3 autres étages s’affairaient toujours. La pratique de déménager par les fenêtres est née de cette époque, sûrement. Puis je dis à Maurice :’on se tire faut aller voir chez nous’.

 Nous dégringolâmes l’escalier une dernière fois, avec un ultime chargement pour le ‘tas Martin’.

Nous revînmes au coin de la Poste et en essayant de courir, nous primes le boulevard Jean-Jaurès vers la gare sur environ 100 m

 Le carnage.  

Avant d’y arriver, nous passâmes devant ce qui restait de l’immeuble bourgeois qui était le centre de rassemblement (à la réflexion judicieusement choisi) pour les secouristes (donc je faisais partie car j‘avais suivi assidûment les cours le soir en 1941 et 1942).

Nous traversâmes les deux grands ponts routiers un peu cabossés, qui enjambaient à la suite l’un de l’autre, les deux grands faisceaux de voies ferrées qui se dirigeaient vers l’est ou la banlieue

Juste après leur passage à hauteur de la gare, en abordant le début de l’avenue Gallieni, nous vîmes un incendie juste dans l’alignement du pavillon de mes parents à 200 ou 300 m à vol d’oiseau.

 Une parenthèse pour signaler que la rue Gallieni juste à la sortie du Pont, avait reçu une bombe en plein milieu et présentait un vaste entonnoir géant.  Les piétons passaient donc en files de chaque côté pour sortir ou rentrer sur le pont.

Côté est où nous passâmes, un agent de la ville avec sa petite pèlerine, signalait un petit trou annexe pour qu’on ne tombe pas dedans.

 La vue de cet incendie particulier, nous donna une nouvelle impulsion et personnellement c’est le trouillométre à zéro, que je dévalais l’avenue, un peu moins encombrée de décombres et plus large que le boulevard Jean-Jaurès.

A mi-route, par l’échappée d’une rue transversale, nous vîmes que c’était un abri de jardin ouvrier qui flambait, adossé au mur de l’école neuve des filles (Charcot).

rue Charcot

Mais quelques instants après, juste avant d’arriver à hauteur de ma rue (Baudin), nous constations sans y croire, stoppés net, que l’appartement du cinquième et dernier étage de l’immeuble en briques situé en pan coupé sur l’avenue Gallieni et la rue Baudin, n’existait plus.

C’était celui de la famille de mon copain, détruit par la chute d’un chasseur anglais qui se trouvait maintenant tout fracassé, disloqué, dans le jardin du pavillon de l’autre côté de l’avenue

Nous parlâmes avec des gens, mais personne ne put nous donner des nouvelles des parents de Maurice

Je me remis à courir vers le 17 Rue Baudin tout près.

Un entonnoir mahous, défonçait la chaussée entre le pavillon de mes parents et le petit immeuble qui lui faisait face.

Mes parents étaient là, sains et saufs. Ils étaient restés dans la cave semi enterrée avec les sous locataires.

Une autre bombe avait éclaté dans le grand jardin derrière le pavillon qui à part une cloison en briques plâtrières éclatée, au deuxième étage et quelques bricoles fissurées ou cassées, presque tous ses carreaux cassés malgré les papiers collés en croix, avait bien résisté dans ses œuvres vives.

 Maurice arriva parlant toujours de ses parents et de sa sœur.

On l’envoya vers l’abri anti aérien du quartier, construit juste au bout de l’école maternelle (Bayard) qui longeait de son long mur aveugle, notre grand jardin et 2 petits pavillons qui suivaient.

Maurice revint assez rapidement réclamant pioche, pelle barre à mine parce que justement une bombe était tombée sur l’abri et ses parents devait y être.

maternelle Bayard

C’était une des bombes du même chapelet qui avait incendié l’abri de jardin précité, fracassé la partie habitation du groupe scolaire Baudin tuant le directeur M Barbier  et sa femme, ainsi que le gardien concierge (ndlr M Picardat) et sa femme, fait un entonnoir en pleine route devant chez nous, et un autre dans notre jardin, bouleversé l’entrée sud de l’abri anti aérien, un autre entonnoir dans le talus qui longeait la ligne de chemin de fer de petite ceinture qui passait là en surélévation, détruit un autre  pavillon transformé en tas mal foutu, le tout dans un aliment quasiment parfait.

La bombe n’était pas tombée en plein sur l’abri construit en long et en zigzag. Elle avait pénétré en pleine terre, contre l’escalier et le premier zigzag que son explosion avez détruit : 2 tués, des blessés, des indemnes mais bloqués ; le dégagement par l’escalier nord était effectué quand nous arrivâmes mon père, Maurice et moi, chacun avec un outil. Il y avait du monde et le travail était commencé intérieurement et par-dessus. Autant que je ne me souvienne, par l’extérieur, on arriva assez rapidement aux occupants bloqués.

Les parents de Maurice étaient effectivement là, indemnes.

Nous quittâmes le site, après que Maurice les eut renseignés sur l’état de leur logement.

Son père qui était brigadier de police, discuta avec mon père, employé de mairie non sédentaire, pour définir ce qu’ils devaient faire, compte tenu de leurs fonctions. Le problème était facile à résoudre, ils partirent dans la nuit …

Une fois de retour chez moi je me changeais pour aller remplir mes fonctions de secouriste. Je mis un pantalon bleu de travail, un jersey ras de cou, mon caban, mes brodequins (le tout issu de mon équipement de marin) et me coiffais du casque de défense passive qui m’avait été attribué.

Pendant ce temps ma mère équipait Maurice, qui voulait venir avec moi, mais habillé un peu zazou, avec chemise blanche et boutons de manchettes. Elle lui donna à la place, de vieux vêtements à moi.

 Il prit au passage dans la cave de ses parents, son casque de cavalier avec le curieux bandeau de cuir frontal, car il s’était engagé en 1942. Affecté au 6 ème hussard à cheval à Tarbes, il avait volé son casque pour le ramener chez lui comme souvenir, quand les boches envahirent en zone libre.

J’avais mis à mon bras le brassard blanc à Croix-Rouge numéroté et estampillé que j’ai encore. Ce brassard me servi efficacement quelques mois plus tard pendant la libération de Paris, que je parcourus en tous sens avec ma bicyclette.

Ainsi équipés, nous remontâmes vers la gare après un petit arrêt pour jeter un coup de l’œil aux débris de l’avion de chasse abattu Il faisait nuit, nous repartîmes rapidement, remettant à plus tard une visite plus nette.

 C’est à la suite de cette visite, que de ma vie je n’ai plus jamais mangé de cervelle.

Beaucoup de gens se trouvaient dans la nuit et les décombres et tous, nos respirions une poussière dense, d’une odeur et d’un goût spécial qui me poursuivit personnellement pendant longtemps.

Arrivé en haut de l’avenue Gallieni, nous nous présentâmes du côté où nous étions déjà passés.

On ne passait plus !

Il y avait une énorme excavation qui ne montrait pas sa profondeur, mais un noir très noir, et là où le policier signalait un petit trou à éviter, elle avait rempli partiellement celle du milieu de la chaussée.

 Elle avait également effondré un grand pan du talus pentu et pierreux sur la voie ferrée en contrebas et détruit la petite maison à étage isolée à cet emplacement qui faisait bistrot de passage. Le policier à pèlerine n’était plus là …

Nous traversâmes à nouveau les ponts et là où était prévu le rassemblement des secouristes en cas de catastrophe, là où tout à l’heure nous avions vu un tas de ruines fumantes, un groupe de gens dont quelques-uns casqués et brassards apparents, formait une masse confuse et bruyante mais efficace puisque le matériel sortait, puisé dans les caves à la lueur de torches électriques.

 Je m’approchais et presque aussitôt, reçu un brancard plié dans les bras avec l’ordre de charger d’abord les blessés ayant des chances (sic), pour les amener à tel endroit. Avec Maurice comme équipier, nous partîmes aussitôt. Je ne me souviens pas si l’on nous assignat un secteur spécial.

A partir de ce moment-là je ne suis plus capable de poursuivre ce récit en restant cohérent chronologiquement.

Nous brancardâmes le restant de la nuit et la matinée, amenant nos prises à un endroit relativement proche du lieu que nous explorions, puis vint l’ordre de les emmener jusqu’au marché couvert du centre, ce qui représentait une distance beaucoup plus longue, donc il fallait revenir, sauf si on nous hélait en chemin.

Nous revînmes de chez mes parents vers 12 / 13 heures, exténués vidés, pour nous jeter tous les deux sur mon lit.

Ma mère nous réveilla le soir et nous emmena à Bondy, commune voisine, où dans une école, de grandes tables qui servaient habituellement pour les marchés, avait été installées et où on servait à manger à ceux qui se présentaient.

Le repas fini, il s’avéra que la famille de Maurice était partie se loger à Bobigny chez un parent et que nos propres parents avaient trouvé une chambre à Bondy dans la même maison que leurs sous locataires.

Après discussion, par manque de lit d’une part et par crainte de pillards d’autre part, Maurice et moi retournâmes coucher dans le pavillon rue Baudin, où mon père avait laissé son pistolet à barillet dans une planque que je connaissais et d’où je l’extirpais ensuite avant chaque nuit.

Nous y couchâmes ensemble au moins une semaine sinon deux, car la commune était déclarée ville morte, sans eau, sans gaz, sans électricité, avec patrouilles nocturnes allemandes ou miliciennes, qui tiraient sur tout ce qui bougeait.

De ce travail de brancardier, qui s’avéra en fait extrêmement pénible, par sa durée, par la marche sur un terrain toujours plus ou moins encombré, par le poids des corps transportés, par nos vêtements qui chauds la nuit et au petit matin, nous firent transpirer jusqu’à midi et dont nous ne pouvions nous alléger sous peine de vol,

Je garde un souvenir global confus, car je vis tant de scènes et des choses atroces, que 48 ans après, j’en ai gardé quelques souvenirs qui me semblent encore précis.

Par exemple il faisait encore nuit, Maurice qui marchait devant, un peu au hasard, passa tout à coup devant un grand porche qui était une grande entrée de cour desservant plusieurs maisons. Je connaissais bien la boutique qui fermait l’angle gauche de l’entrée de cette cour, sa devanture étant en façade sur le boulevard de la république, car étant gamin, j’allais y acheter des soldats de plomb

Ca flambait ferme dans cette cour et beaucoup de cris arrivaient à dominer le bruit. Maurice fonça, des gens installèrent un corps en piteux état dans notre brancard et demi-tour. Nous n’avions pas traîné, mais l’entrée devenue sortie, brulait des deux côtés avec vigueur. Les flammes nous opposant un barrage de feu. La tête casquée de Maurice hurla quelque chose que je ne compris pas, mais je du précipitamment serrer fortement les mains sur les poignées du brancard. Je baissais la figure sur ma poitrine, ­et retins ma respiration, le temps de traverser le rideau de feu. Nous avions eu de la chance cette fois

Je raconte un autre exemple. Quand le jour fut venu, nous nous arrêtâmes devant un grand trou béant, bien délimité au ras du sol. C’était une grande et belle cave rectangulaire. Le pavillon construit suivait dessus avait été proprement soufflé, escamoté. Rien n’était tombé dans cette cave où l’on distinguait ­­les objets hétéroclites habituels rangés, ainsi que dans un angle l‘inévitable tas de charbon

Je me souviens qu’il y avait deux personnes assises sur des chaises contre un mur : un homme et une femme L’homme était assis normalement, mais le menton sur sa poitrine. Il était mort. Le corps de la femme un peu disloqué, s’appuyait contre l’épaule gauche de l’homme et la tête complètement séparée du corps, reposait sur ses genoux Déjà un peu blasés, nous souhaitâmes à voix haute, bien du courage à ceux qui se rechargeraient d’enlever ces deux corps

Dans le courant de la matinée nous passâmes par la rue de l’Union qui était très détruite des deux côtés, pour retrouver nos ‘partenaires’ du bal nocturne, qui avaient rassemblés par lots tout ce qu’ils avaient pu récupérer avant le feu, et attendaient assis ou debout, la suite des événements, réchauffés par la chaleur que dégageait la carcasse de leur immeuble.

L’un d’eux voulut absolument nous servir à boire et débouchât une bouteille de champagne non frappée, et pour cause.

Tout le monde n’y eut pas droit : il n’y avait qu’une seule bouteille, et ce furent les premières gorgées de champagne de ma vie, bues pendant l’accomplissement d’une triste et peu ragoutante besogne.

Les 8 ou 15 jours qui suivirent cette journée du 19 avril 1944 sont flous dans ma mémoire. Nous arpentions la ville dans tous les sens, pour donner un coup de main ici ou là.

Seul le travail à la main était possible : tous les engins de maintenant n’existaient pas encore, sauf dans l’armée alliée.

Les routes principales étaient dégagées à la pelle et à la pioche.

 Je me souviens d’une expédition que nous entreprîmes pour descendre dans le trou béant qui était auparavant l’appartement de mon copain Maurice. Il nous fallut des cordes.Nous ne récupérâmes que quelques bricoles et pièces vestimentaires. Tout ce qui ne s’était pas volatilisé, était broyé. Par contre par les planchers crevés, nous récupérâmes plus amplement, dans l’appartement situé en dessous, pour le compte de la locataire, femme de prisonnier, qui nous fut très reconnaissante. Plus tard je su qu’elle récupéra le mobilier encore utilisable.  Puis Maurice parti vivre à Paris en faisant du marché noir.  Il avait loué une chambre de bonne dans l’immeuble occupé au rez-de-chaussée pas les grands magasins SOOLS, près d’une sortie du métro Strasbourg Saint-Denis.

Je repris mon travail à la perception repliée sur Bondy et je le rejoignis après le 17 juillet 44.

Mon patron percepteur, m’avait averti qu’il avait rempli un imprimé mentionnant ses employés males, ayant l’âge d’être astreint au service du travail obligatoire en Allemagne.

 La classe 43 était touchée, raflés les réfractaires et poursuivis judiciairement les parents des ‘disparus’.

La libération de Paris le 19 au 26 août 1944 porta un coup fatal au retour du STO.

Noisy subi trois autres bombardements allemands ceux-là dont je n’eus connaissance que longtemps après :

Le 7 août1944 : 46points de chutes, 21 blessés

Le 26 août 1944 : aucune victime

Le 4 octobre 1944 : explosion en l’air d’un V2 destiné à l’Angleterre : aucune victime.

La commune fut citée à l’ordre de l’armée, le 11 novembre 1948 et reçu la croix de guerre 1939 45 et elle-même me décora de la médaille commémorative 1939 45 avec agrafe ‘Défense passive’, en 1949.

Je l’avais déjà après ma petite guerre en Italie avec l’agrafe’ libération’

Récit mis en forme à l’occasion du 50ème anniversaire de la libération de la France, à partir de notes jetées en vrac, sur un petit carnet bleu, pendant mon séjour à la clinique de l’Espérance, à Angers , suite à mon infarctus du 31/12/1984, et pendant ma convalescence de 21 jours au même endroit, suite à mon double pontage du 6 mai 1985, à l’hôpital nord de Nantes.

Robert Pacaud

mise en forme Christophe Nicolas

 

 

 

L’article 1944, le carnet bleu, témoignage de Robert Pacaud est apparu en premier sur Noisy le sec histoire.

1789, la convocation des Etats Généraux

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Prévôté de Paris Hors-murs

L’institution des Etats Généraux est créée par Philippe le Bel en 1302 pour donner une apparente légitimé à ses décisions. 

Philippe Le Bel

Elle est divisée en trois ordres, la noblesse, le clergé, et le tiers état. Le vote se fait par ordre. Les députés sont élus dans tout le royaume.

Les 3 ordres

Chaque ordre est chargée de rédiger et d’apporter des cahiers de doléances.

Cette assemblée n’avait plus été réunie depuis 1614 par Louis XIII.

Louis XIII

Suite aux difficultés économiques des années 1780 dues notamment à la guerre de sept ans, Louis XVI et son ministre des finances Jacques Necker décident de convoquer les états généraux dans le but de lever de nouveaux impôts. Le roi en fixe l’ouverture au 1er mai 1789 en soulignant qu’il jouit d’avance du consolant espoir de voir des jours sereins et tranquilles succéder à des jours d’orage et d’inquiétude. 

Jacques Necker

Louis XVI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les habitants du royaume attendent les élections avec la plus vive impatience.

Cette attente est illustrée par la déclaration de Emmanuel-Joseph Sieyès, souvent appelé « l’abbé Sieyès » (S I E Y E S, à ne pas confondre avec Jean Alexandre Seyes S E Y E S inventeur du formatage du papier portant son nom) :

L’abbé Sieyès

Qu’est ce que le Tiers Etat ? Tout

Qu’a-t-il été jusqu’à présent dans l’ordre politique ? Rien

Que demande t’il ? A devenir quelque chose.

 

 

En 1789, la France compte environ 26 millions d’habitants, dont 100 000 appartenant à la noblesse, et 160 000 au clergé.

L’administration française est divisée en Baillage ou Sénéchaussée. Cela correspond aux divisions administratives du royaume. Le terme baillage est utilisé dans le nord et l’est de la France, la sénéchaussée dans le sud et l’ouest. Par exception la région Parisienne est appelée Prévôté.

Il y aura 330 députés pour la noblesse, 326 pour le clergé et 661 pour le tiers état.

Le nombre de députés par baillage est décidé en fonction de sa population et de la contribution qu’elle apporte aux finances de l’état.

Tous les baillages et sénéchaussées sont représentés y compris celles d’Outre-Mer, on trouve par exemple Pondicherry et la Guadeloupe.

La Prévôté de Paris correspond à peu près à la région Ile de France actuelle.

Prévauté de Paris

Pour les élections, la Prévôté de Paris est divisée en deux : d’une part Paris et ses faubourgs qui correspond au Paris actuel, et Paris hors murs regroupant les départements de la région parisienne dont Noisy-le-Sec fait partie.

Elle compte environ un million d’habitant, dont 500 000 pour la prévôté de Paris hors-murs.

Participent aux élections :

Pour la noblesse tous les hommes votent, y compris les garçons en bas âge qui peuvent se faire représenter.

Pour le clergé, tous les ecclésiastiques.

Pour le tiers Etat les hommes âgés de plus de 25 ans et « inscrits au rôle des impositions ».

Pour Louis XVI, ce mode de scrutin est juste car il n’y a que peu d’exclus. Ce sont les journaliers, manœuvres, gagne-deniers sans la moindre propriété, les ouvriers et les domestiques.

Chaque commune est chargée d’élire des électeurs qui iront les représenter à l’élection des députés du tiers état et de rédiger ses cahiers de doléances.

exemple de cahier de doléances

En 1789, Noisy-le-Sec comptait 1 300 habitants pour 299 feux. Pour cette population seulement 60 votants répondent à ces critères. Ils doivent élire 3 délégués pour représenter la commune à l’élection de la prévôté. C’est le nombre minimum de représentants pour les communes de moins 200 votants.

Le lundi 13 avril 1789, l’assemblée des électeurs de la commune est convoquée de manière habituelle au son de la cloche pour se réunir en la chambre du conseil de l’audience de Noisy.

Sont élus : (comme ils sont déjà sur le site je vous les rappelle pour ceux qui les auraient oubliés)

  • Pierre Marcel Cottereau, notaire.
  • Etienne Nicolas, procureur fiscal.
  • Jean Cottereau, marchand et propriétaire, syndic perpétuel. 

(Dans l’ancien régime un syndic est élu par sa communauté pour remplacer le seigneur dans la commune. Au début du XVIII siècle, la monarchie crée et vend la charge de Syndic Perpétuel pour réduire les pouvoirs des seigneurs au profit du roi. Le syndic perpétuel est en charge de garder tous les papiers de la communauté, de conseiller le syndic ordinaire, de gérer toutes les correspondances avec l’administration royale et de surveiller tous les impôts perçus.)

Un dimanche après la messe, on vint annoncer aux paysans qu’ils devaient se réunir pour rédiger des cahiers destinés à faire parvenir leurs plaintes au roi. Pour les aider, de Paris furent envoyés des modèles qui parfois furent recopiés tel quel.

Comme dans tout le royaume les habitants de Noisy ne connaissaient que ce qu’ils voyaient autour d’eux. La terre qu’ils cultivaient, mouillée de tant de sueur, était chargée de mille servitudes, qui paraissaient encore plus pesantes après l’hiver si rigoureux de l’année 1787-1788. Donc c’est avec enthousiasme que ces cahiers furent élaborés.

Extrait des cahiers de doléances de Noisy Le Sec :

Art 3 : La suppression de tous les impôts sur le cultivateur et l’établissement de l’impôt territorial.

Art 4 : L’abolition de corvées.

Art 8 : La destruction des lapins.

Art 12 : Une augmentation des revenus aux curés et aux vicaires.

Art 14 : Qu’il ne soit plus envoyé d’argent à Rome pour les annates, et que ces sommes soient  employées aux réparations des presbytères actuellement à la charge des provinces.

Art 19 : La réforme du code civil et criminel.

Art 21 : La suppression des privilèges exclusifs, comme odieux et infiniment nuisible ; permission aux habitants de Noisy et à tous ceux des paroisses voisines de Paris d’aller prendre aux fossés de Montfaucon les gadoues, absolument nécessaires à l’engrais des terres.

Art 22 : La diminution du prix du pain.

Ces cahiers qui paraissent trop élaborés sont-ils rédigés par Maître Cotereau notaire ou recopiés dans les listes qui circulaient ?

L’élection de la Prévôté Paris Hors-murs :

Pour le Tiers-Etat, les élus des communes doivent se réunir le 18 Avril 1789 pour élire les grands électeurs qui les représenteront à l’élection des députés de la prévôté.  Ce jour environ 1800 élus des communes représentant environ 600 paroisses se présentent. Ils élisent les 450 grands électeurs qui sont convoqués à Paris.

Archevêché de Paris

L’élections des députés de tous les ordres est prévue le vendredi 24 avril 1789 à 7 heures du matin dans la grande salle de l’Archevêché de Paris.

La grande salle de l’Archevêché

Sont convoqués :

  • Tous les nobles de la prévôté, soit 312 membres. Versailles en fournissant le plus gros contingent.
  • Tous les ecclésiastiques officiant dans la prévôté, 540 membres auxquels il faut ajouter 572 procurations. (Les curés officiant unique dans une cure n’étant pas obligé de se déplacer).
  • Les grands électeurs du tiers-état élus le 18 avril, environ 450 députés.

Pour la prévôté de Paris Hors-murs 12 sièges sont prévus. 3 pour la Noblesse, 3 pour le Clergé et 6 pour les Tiers Etat.

Le 24 avril, après avoir entendu une messe à Notre Dame, l’assemblée regagne la grande salle de l’archevêché.  Les débats commencent :

Les points suivants font l’unanimité :

  • La prévôté comptant environ 500 000 habitants est sous-représentée, il faudrait pour équilibrer avec les autres baillis 8 sièges de plus. Des émissaires sont immédiatement envoyés à Versailles pour porter réclamation. Il leur est accordé 4 sièges de plus soit. 1 pour la Noblesse, 1 pour le Clergé et 2 pour les Tiers Etat.
  • Les impôts doivent être payés par tout le monde, nobles et clergé compris.

Sont élus :

Clergé.

  1. Le Guen Pierre-Marie, curé d’Argenteuil.
  2. Melon de Pradou Martial, curé de Saint-Germain-en-Laye.
  3. de Beauvais Jean-Baptiste-Charles-Marie, ancien évêque de Senez.
  4. de Coulmiers François Simonnet, abbé d’Abbécourt, ordre des Prémontrés.

Noblesse.

  1. du Val d’Eprémesnil Jean-Jacques, chevalier, conseiller au parlement de Paris.
  2. Duc de Castries Armand Maréchal des camps et armées du roi, Lieutenant général de la province du Lyonnois et Forez.
  3. d’Ormesson de Noyseau Anne-Louis-François, président à mortier au parlement de Paris.
  4. de Crussol d’Uzès Alexandre, maréchal des camps et armées du roi, chevalier de ses ordres.

Tiers état.

  1. Afforty Pierre, laboureur à Villepinte. (Un laboureur vit de l’exploitation des terres dont il est propriétaire contrairement au cultivateur qui loue des terres)
  2. Duvivier Pierre-Charles, laboureur à Bonneuil-en-France.
  3. Chevalier Étienne, vigneron à Argenteuil.
  4. Target Guy-Jean, ancien avocat au parlement, l’un des quarante de l’Académie française.
  5. Ducellier François-Jacques, ancien avocat au parlement et cultivateur à Combault.
  6. de Boislandry François Louis, négociant à Versailles.
  7. Lenoir de la Roche Jean-Jacques, avocat au parlement.
  8. Guillaume Louis-Marie), avocat au parlement et aux conseils du roi, juge de Saint-Cloud.

Les députés élus des trois ordres seront chargés de rédiger les cahiers de doléances de la prévôté regroupant ceux des communes.

Voici quelques revendications relevées dans ces cahiers :

Les cahiers de doléances de la noblesse :

  • Vote par ordre, et non par tête.
  • Responsabilité personnelle des ministres, notamment du ministre des finances.
  • Vérification du budget de l’état par les états généraux.
  • Paiement des impôts par le clergé.
  • Education nationale ouverte à tous les enfants.
  • Uniformisation des poids et mesures.

Les cahiers de doléances du Clergé :

  • Meilleure répartition des grains dans les paroisses.
  • Le clergé accepte de payer des impôts.
  • Education des peuples à la foi par les ordres réguliers.
  • Des écoles gratuites pour l’éducation des enfants.
  • Suppression des loteries car ce sont des pièges tendus à la cupidité.
  • Création des maisons d’enfants trouvés dans tout le royaume.
  • Interdiction des livres et desseins obscènes et impies pour ne pas corrompre le peuple…

Les cahiers de doléances du tiers état :

  • Paiement des impôts par tous
  • Vote par tête
  • Une loi fondamentale et constitutionnelle : que tous les hommes naissent libres et aient un droit égal à la sécurité et à la propriété de leur personne et de leurs biens.
  • Abolition des corvées.
  • Conservation du gouvernement monarchique avec un pouvoir législatif.
  • Que les ministres et autres agents de l’administration soient responsables envers la nation de l’autorité qui leur est confié.
  • Rédaction d’un code civil.

Pendant ce temps à Versailles, le roi prépare la tenue des Etats Généraux. Il aménage une salle provisoire à colonnes dans l’hôtel des Menus Plaisirs pour l’assemblée des trois ordres de ainsi que trois salles annexes, une par ordre pour que les députés puissent débattre et se mettre d’accord pour le vote par ordre.

Hôtel existe toujours de nos jours

Noblesse et clergé

Il fixe le règlement de la séance. 

Sur son ordre, les députés de la noblesse doivent être vêtus de noir et or, les députés du clergé garderont les vêtements religieux de cérémonie, le tiers état sera tout en noir.

Le 4 mai 1789, s’ouvre la première séance.

5 mai 1789

A son arrivée le roi est applaudi, la reine non.

Le discours du roi expose la situation catastrophique des finances du royaume, des coupes sombres à faire dans le budget, l’assujettissement des trois ordres au impôts, ainsi que l’amour du roi pour ses sujets et l’expression des représentants de la nation.

Ce discours très applaudi, fait penser aux députés du Tiers Etat que le vote par tête est possible.

Après le discours décevant de Necker où les députés ne voient rien qui annonce des réformes espérées, les dissensions éclatent très rapidement sur la manière de voter. Le clergé et la noblesse souhaitent que le vote ait lieu par ordre, ce qui leur assure la majorité ; le Tiers Etat réclame le vote par tête, ce qui lui assurerait l’égalité et que les débats aient lieu en commun. Le tiers état fait valoir qu’il représente à lui seul la Nation, et refuse ainsi de quitter la place. Le 10 juin, le tiers état, à l’initiative de Sieyès, invite les députés des deux autres ordres à les rejoindre. Certains d’entre eux, comme La Fayette et des clercs proches du peuple, s’unissent au troisième ordre. On assiste ainsi à une révolution à caractère juridique : la suppression des ordres, face au roi, auxquels se substitue une représentation nationale en une seule assemblée. Le groupe ainsi constitué se proclame donc Assemblée Nationale, sur la motion de l’abbé Sieyès, le 17 juin, car « il représente 96 pour cent de la nation », se donnant ainsi le pouvoir de consentir les impôts. Devant ce premier acte révolutionnaire, Louis XVI, fait fermer le 20 juin la salle des états généraux que préside Necker, sous prétexte de travaux.

Le Tiers Etat réclame le vote par tête

Sur la proposition du Docteur Guillotin, les députés ralliés au Tiers Etat cherchent une autre salle pour se réunir. Ce sera la salle du jeu de Paume à Versailles et aboutira au célèbre serment du Jeu de Paume.

« Nous jurons de ne jamais nous séparer et de se rassembler partout où les circonstances l’exigeront, jusqu’au jour où la constitution du royaume sera établie et affermie sur des fondements solides »

Ce serment constitue l’acte fondateur de la démocratie française.

Les noms de tous les députés présents

Les députés Paris hors les murs

Actuellement, dans la salle du jeu de paume à Versailles, on retrouve les noms de tous les députés présents, et une copie du  célèbre tableau de Jacques Louis David représentant ce moment :

Vous reconnaîtrez :

  • Bailly debout qui proclame le serment,
  • Robespierre
  • Mirabeau
  • La Fayette
  • L’abbé Grégoire
  • Le Docteur Guillotin moins célèbre pour ses déclarations pendant la révolution.

Une esquisse de ce tableau où les personnages sont dessinés nus avant d’être vêtus, est toujours dans les collections du château de Versailles.

Mais revenons à notre tableau

 Tout à droite, on voit Joseph MARTIN-DAUCH, recroquevillé sur sa chaise, les bras en croix. Il est le seul député à avoir voté contre le serment, laissons-lui la parole, il va se présenter et nous expliquer ses motivations et sa vie dans cette période troublée.

Joseph Martin Dauch

« Je suis né en 1741 à Castelnaudary dans la Sénéchaussée de Lauragais, sénéchaussée plutôt aisée plus connu sous le nom de pays de cocagne, aujourd’hui on parlerait plutôt du département de l’Aude. Mon père était conseiller du roi, lieutenant principal de la sénéchaussée, et propriétaire de domaines. 

Je fis des études sérieuses à Toulouse. En 1762, licencié ès lois, j’exerce les fonctions de propriétaire et légiste c’est-à-dire spécialiste des lois.

Je me lance en politique à l’âge de 48 ans en me faisant élire député aux Etats Généraux pour le tiers-état avec pour mandat : « Aviser et consentir à tout ce qui concerne les besoins de l’État, réformer des abus,  établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’Administration, prospérité générale du Royaume et bien de tous et de chacun des sujets du Roi. 

Ma petite célébrité commence le 20 juin 1789, lorsque tous les députés sont invités à venir signer le serment. L’appel se fait par bailliages, sénéchaussées suivant l’ordre alphabétique. À l’appel de mon nom, je me lève, m’avance et déclare refuser de signer. Je déclare :  La ville de Castelnaudary ne m’a pas envoyé pour insulter et déchirer la Monarchie ; je proteste contre le serment adopté.

On m’insulte, me traite de renégat, de traître. Des poings se lèvent, menaçants. Bailly me demande  de m’abstenir et de ne pas faire opposition au vœu de l’Assemblée. Je réponds que je ne peux jurer d’exécuter des délibérations qui ne sont pas sanctionnées par le Roi. Je signe en inscrivant près de mon nom : « opposant »

Camus se tourne vers l’Assemblée agitée et crie : « J’annonce à l’Assemblée que M. Martin-Dauch a signé : opposant ». Une rafale de cris et de poings levés me répond. Armé d’un poignard, un député s’avance pour m’assassiner. Un député du Lauragais, essaie de me protéger. Un huissier me prend le bras et me fait sortir par une porte dérobée.

Le lendemain je reçois la visite de Bailly qui essaie de m’amener à une rétractation. Je refuse. Le procès-verbal conclut : « L’opposant persiste dans son avis, et l’Assemblée arrête qu’on laissera sur le registre la signature pour prouver la liberté des opinions ». Quelques jours après, je reprends ma place parmi mes collègues et siège jusqu’à la fin de la Constituante avec la fuite du roi.

Le 14 septembre 1791, quand Louis XVI reparaît à l’Assemblée après sa fuite de Varennes, tous les députés avaient décidé de rester assis sur leur banc, la tête couverte de leur chapeau .Fidèle à mon roi je me lève seul et ôte mon chapeau pour lui rendre hommage.

Après cet affront, je me retire à Castelnaudary. Je me sens surveillé par le club révolutionnaire. Un soir, en rentrant chez moi, un sans-culotte tente de m’assassiner. Traqué, je pars me cacher, utilisant toute la vitesse de mon cheval. Dénoncé, je suis arrêté à Toulouse, emprisonné pour être guillotiné pendant cette période que les historiens appelleront la Terreur. Heureusement une erreur d’écriture me fera échapper à la mort. J’étais inscrit aux greffes de la prison avec pour prénom Martin et nom D’Auch au lieu de Joseph Martin-Dauch. Le Tribunal accordera la liberté à ce Martin inconnu, originaire de la ville d’Auch.

Ensuite je me désintéresse de la politique, je retourne à Castelnaudary  m’occuper de mon domaine familial. »

Il mourut célibataire le 5 juillet 1801 à l’âge de 60 ans.

Sénéchaussée du Laugarais

Annick et Cyprien Lefebvre

 

L’article 1789, la convocation des Etats Généraux est apparu en premier sur Noisy le sec histoire.


1945, une nouvelle dénomination pour certaines rues de Noisy-le-Sec

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A la Libération, la délégation spéciale ayant à sa tête Henri Quatremaire, décide le retour à d’anciennes dénominations ou en décrète de nouvelles.

  • 16 octobre 1944, décision du conseil municipal
  • 20 mars 1945, H Quatremaire alors président de la délégation spéciale s’adresse au Préfet pour l’informer de la décision d’attribuer à titre d’hommage public à des voies de la commune
  • 22 octobre 1945 pose des nouvelles plaques de rues.

A – Les rues qui reprennent leur nom :

La rue Denfert Rochereau / rue Henri Barbusse

Rappel, le 11 octobre 1935, le conseil municipal décide de donner le nom d’Henri Barbusse à la partie de la rue Denfert Rochereau comprise entre la rue Saint Denis et le boulevard Michelet.

1935 inauguration de la rue Henri Barbusse

 

Henri Barbusse est un écrivain, homme politique et journaliste français, né le 17 mai 1873 à Asnières et mort le 30 août 1935 à Moscou. Il relate sa vie au front pendant la Première Guerre mondiale dans son roman Le Feu qui remporte le prix Goncourt en 1916. Résolument pacifiste, il fonde l’Association républicaine des anciens combattants en 1917 et adhère au Parti communiste en 1923. Se consacrant à son activité de journaliste, il devient directeur littéraire de l’Humanité en 1926. Il fonde la revue Monde en 1928.

La délégation spéciale mise en place en 1939 à Noisy après la signature du pacte germano-soviétique, débaptise la rue et lui redonne son ancien nom.

1945, retour au nom d’Henri Barbusse justifié ainsi :

Rue de Pantin / rue Paul Vaillant-Couturier

La rue de Pantin fut baptisée Paul Vaillant-Couturier le 16 novembre 1937.

Paul Couturier, connu sous le pseudonyme de Paul Vaillant-Couturier, né le 8 janvier 1892 à Paris et mort le 10 octobre 1937 dans la même ville, est un écrivain, journaliste et homme politique français. Il a participé à la fondation du Parti communiste français.

Il est député de la Seine de 1919 à 1928 et de 1936 à 1937 et maire de Villejuif de 1929 à 1937. Il est rédacteur en chef de L’Humanité de 1926 à 1929 et de 1935 à 1937.

B – Les nouvelles dénominations :

Voie IA / rue Jules Auffret

Elle rend hommage à Jules Auffret (1902-1931) fusillé comme otage le 22 octobre 1941 à Châteaubriant. Ouvrier syndicaliste et communiste ; maire adjoint de Bondy et conseiller général de Noisy-le-Sec, il fut arrêté en 1939 au moment du pacte germano-soviétique.

22 octobre 1945, pose de la plaque de rue

Rue de la Madeleine / rue Pierre Sémard

Pierre Sémard, 1887-1942 syndicaliste secrétaire général de la fédération des cheminots CGT dirigeant du parti communiste dont il fut secrétaire général de 1924 à 1929. A la suite du pacte germano soviétique il est exclu de la CGT et révoqué de son mandat de son mandat de conseiller général de la Seine. Il est incarcéré à la santé sur plainte de ses anciens camarades. Il est condamné à 3 ans de prison, il est transféré à la prison d’Evreux le 6 mars 1942 il est livré comme otage aux allemands et fusillé le 7 mars 1942.

Dénomination de rue justifiée ainsi :

22 octobre 1945 pose de la plaque au n°43 de la rue, numéro identifié grâce à la devanture de Dalle, photographe

rue Damas / rue Pierre Brossolette

Pierre Brossolette est un journaliste, homme politique et résistant français, Compagnon de la Libération, né le 25 juin 1903 à Paris où il est mort le 22 mars 1944.

En 1940, Pierre Brossolette intègre le réseau du Musée de l’Homme, puis la Confrérie Notre-Dame. Il établit des liens avec plusieurs organisations telles que Libération-Nord et l’Organisation civile et militaire (OCM) entre autres. Après avoir rejoint Londres, il mène à bien trois missions clandestines en France.

Arrêté par le Sicherheitsdienst (service de sureté appartenant à la SS), il choisit de se suicider, se jetant par la fenêtre du 5ème étage, rue des Saussaies, après avoir donné un nom, le sien. Ses cendres sont transférées au Panthéon, le 27 mai 2015.

Rue de l’Eglise / rue du Père Guilhaire

Joseph Guilhaire né le 18 novembre 1891. Frère dominicain résistant affilié au groupe « La Vérité Française » arrêté le 25 novembre 1941 condamné à mort en France  décapité en Allemagne le 5 décembre 1942.

« Déporté et fusillé par les allemands pour avoir pris la défense des juifs dans les journaux clandestins » délibération CM du 16 octobre 1944.

22 octobre 1945, inauguration de la rue en présence d’un frère domicain

Anne-Marie Winkopp

 

L’article 1945, une nouvelle dénomination pour certaines rues de Noisy-le-Sec est apparu en premier sur Noisy le sec histoire.

La Fabrique de saint Etienne

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Qu’est-ce qu’une Fabrique ?

Au départ c’est une assemblée de clercs dépendant d’une église auxquels s’ajoutent, depuis le concile de Trente, au milieu du XVIème siècle, des laïcs chargés de l’administration des biens de la communauté paroissiale.
Les membres du conseil de Fabrique sont des administrateurs désignés sous le terme de Marguilliers ou fabriciens.

Pour mieux comprendre il est utile de rappeler l’organisation de la Société sous l’Ancien Régime.
Les instituions ont évoluées au cours des siècles mais il n’existe aucun texte qui fixent leurs compétences. A la veille de la Révolution quatre divisions coexistent et s’entremêlent ; diocèses, gouvernements militaires, baillages et sénéchaussées auxquels s’ajoutent les généralités et les provinces.
En outre, il faut différencier les villes et les campagnes. Si les villes sont assez structurées, dans les campagnes la vie s’est constituée autour de la circonscription dénommée « paroisse ». On parle aussi de « communautés » d’où naîtra le nom de commune.
La paroisse est l’étendue du territoire soumis à l’autorité spirituelle d’un curé et l’église est le lieu de réunion commode à l’occasion des cérémonies du culte, les dimanches et jours de fête. C’est à l’église que se rencontrent les habitants disséminés aux alentour. C’est là qu’ils vont se réunir pour parler de leurs problèmes et décider ensemble des mesures à prendre au niveau de la communauté.

Noisy, population de paysans est donc un village qui va se développer autour de son église dédiée à st Etienne. Notons que Merlan , pourtant agglomération distincte , fait partie de la Paroisse de Noisy puisqu’elle ne dispose pas d’église propre.
A la fin du XVIIème siècle, les communautés ont acquis une relative indépendance. Si l’autorité royale pèse par l’intermédiaire des intendants, les communautés ont leurs assemblées qui portent sur tous les points qui intéressent la vie des habitants. S’il existent des fonctions laïques comme l’élection des syndics ou des messieurs, ou la gestion des biens communaux ou de la collecte des impôts, la collecte l’organisation de la Paroisse est confiée à la Fabrique, chargée de la gestion des intérêts matériels de l’église.

église saint Etienne au 17ème siècle – illustration

Le curé est le chef spirituel et jouit d’une influence considérable sur ses fidèles, la religion chrétienne concernant l’ensemble des habitants.

Il peut recevoir dons et legs et l’église possède des terres distinctes de celles de la Fabrique, qui lui confèrent une partie de ses revenus.
Venons–en au règlement de la Fabrique datant de 1765 tel qu’on le trouve dans le livre d’Hector Espaullard. Je vais essayer de résumer car il ne contient pas moins de 54 articles.
La Fabrique est dirigée par deux marguilliers qui sont renouvelés un an sur deux par vote de l’assemblée et choisis parmi « des habitants de bonnes mœurs, d’une probité reconnue et qui par leur état et profession puissent en remplir les devoirs avec assiduité »

L’élection a lieu tous les ans, le dimanche de la Passion, en présence du curé, des marguilliers en charge, des anciens marguilliers et habitants du lieu qui voudront y assister.

C’est le marguillier qui exerce la 2ème année qui gère les deniers (c’est à dire les avoirs liquides) ainsi que les rentes de la Fabrique. Il ne peut engager aucune dépense extraordinaire (au-delà de 10 livres) ou engager de procès sans délibération de l’assemblée, telle qu’elle a été décrite ci-dessus.

Il devra rendre compte de sa gestion le 1er dimanche d’octobre après sa sortie d’exercice.
Tous les comptes, pièces justificatives sont inscrites et déposées sur un registre placé dans un coffre fermant à 3 clefs et 3 serrures différentes placé dans la sacristie. Les clefs seront remises au curé, au marguillier chargé de l’exercice comptable et à un notable habitant, choisi par l’assemblée.
Ces comptes sont présentés à l’archevêque quand il vient en visite. Les baux et héritages appartenant à la Fabrique seront passés devant notaire. Le curé doit faire les réparations de l’église et du presbytère tandis que les marguilliers doivent veiller à sa propreté. Il est même prévu que «  dans les beaux temps, il y ait quelques vitraux de l’église ouverts pour prévenir l’humidité »

Plusieurs articles sont dédiés à la concession des bancs. Par exemple, le prix des chaises est fixé à 2 liards « sauf à partir, ledit prix plus haut pour les jours et fêtes solennelles et ceux où il y aura sermons, s’il est jugé convenable par une délibération prise par l’assemblée ».

De même, bedeau et autres serviteurs de l’église ne pourront être nommés ou congédiés que par délibération prise par une assemblée des habitants.
A l’administration de la Fabrique s’ajoutent les articles concernant les biens et les revenus de la « Charité ».

La Charité est la partie de la Fabrique qui s’occupe des œuvres de bienfaisance.
Les assemblées concernant la Charité de Noisy-le-Sec se tiennent sous la même forme que celle s de la Fabrique sous la présidence du curé.

Seront nommées dans une assemblée et par la pluralité des voix 12 filles de la Paroisse qui seront chargées chacune un mois de quêter pour les pauvres, aux offices de l’église.
Un procureur est élu pour 3 années pour faire la recette des deniers et les employer à l’acquit des charges et à la subsistance et entretien des pauvres et autres dépenses nécessaires.
Il doit rendre des comptes une fois par an et disposer le reliquat dans le coffre dédié à la Charité, sachant que dans ce coffre, les produits de chaque quête sont immédiatement déposés et que le coffre a lui aussi trois clefs, une au curé, une au procureur fiscal, une au procureur de la Charité. Le coffre est ouvert tous les 3 mois.

Le procureur distribuera les aumônes sur signature du curé mais uniquement en nature, comme pain, viande, vin et autres choses semblables.
Il est bien précisé que ne seront point assistés ceux qui seront abonnés au vin ou à la débauche, les jureurs et généralement tous ceux et celles qui seront de mauvaises mœurs et pareillement ceux qui négligeraient d’envoyer leurs enfants aux écoles, catéchisme et instructions.

En 1782, est édité un nouveau règlement sur arrêt de la cour du Parlement ont nous avons un exemplaire.

Il ne diffère guère de celui dont je viens de parler. S’y ajoutent quelques précisions sur la sonnerie des cloches, le choix et les devoirs des chantres, enfants de chœur et bedeau qui doivent être assidus à leurs devoirs et exécuter les ordres à eux donnés.
Les habitants qui sont revêtus de surplis ou de chape auront place dans les stalles du chœur, recevront le pain bénit et auront préséance sur toute autre personne qui ne font pas partie du clergé.

Un article définit la distribution du pain bénit, redéfinit la concession des bancs. Les 3 derniers articles laisse entendre à un certain laisser-aller des paroissiens qui doivent se comporter dans la dite église avec la révérence convenable et le respect du à la Divine majesté  et à la sainteté du lieu. Leur sera fait défense d’y causer aucun scandale et d’y mener aucun chien ou autre animal capables d’occasionner et d’y faire du bruit.

Sont également enjoint aux personnes qui ne peuvent se dispenser d’apporter leurs petits enfants à l’église de se placer proches des portes afin de pouvoir les sortir aussitôt qu’ils commenceront à crier.

Et le règlement se conclut par la défense de tenir au dit Noisy le Sec aucunes foires et marchés les jours de dimanche et fêtes solennelles et les dit jours, aucunes dans publiques appelées fêtes baladaires. Défense pareillement faite à tous cabaretiers ou autres vendant du vin de recevoir dans leurs maisons aucun habitant de la paroisse les dit jours pendant la grand messe, le sermon et les vêpres et à tout bateleur et autres de jouer et faire aucune représentation permise et licite pendant le service divin .
L’administration, des biens et revenus de la Charité, ne varie guère.
Nous avons vu que la Fabrique qui gère les biens matériels avait possibilité de recevoir dons et legs.

En voici quelques exemples relevés par Hector et Espaullard :

  • le 25 janvier 1515, don de Rolland Girard et Jehanne sa femme de deux demi quartiers de vigne
  • le 23 juin 1590, par testament Denis Alix lègue une rente annuelle et perpétuelle de 30 livres.
  • vers 1630, dons de Denis Goullard, jean Vié, Jean Trousselard soit 3 quartiers 8 perches de terre et 36 livres de rentes.
  • Parallèlement, en 1578 les marguilliers font l’achat d’une maison proche et attenante à l’église.

Sous le ministère  du curé Gilles Guérin, la Fabrique reçoit beaucoup de legs et de fondations, en particulier le testament d’Antoine Blancheteau le 9 mai 1663. « La testateur donne à l’œuvre de la Fabrique1 demi arpent de terre labourable ainsi que la somme de 11 livres, 12 sols, 6 deniers de rente pour chacun des ans ». A charge tout de même de faire célébrer tous les vendredis une messe à perpétuité pour le repos du dit testateur et de Françoise Guillard sa femme quand il plaira à Dieu de les appeler de ce monde… et soit mise et attachée une plaque de taille ou de marbre , tel qu’il plaira aux exécuteurs du dit testament (il s’agit des marguilliers) contre le pilier qui est vis à vis de la chaire à faire les prosnes, le plus proche de la place de la sépulture, pur servir à la postérité !

S’y ajoutera un codicille de 41 livres, 12 sols et 6 deniers.

En 1665, c’est Jacqueline Mautuit, veuve de Denis Gouillard qui lègue à la Fabrique, en échange de 4 messes basses de requiem par semaine et de 6 saluts par an, 2 arpents de terre, la moitié d’une maison sise à Paris, rue st Martin, 60 livres 10 sols de rente perpétuelle et une autre de 22 livres et encore 30 livres à la confrérie de la Charité à charge pour les marguilliers de distribuer aux pauvres qui se trouveraient à son enterrement 60 livres tournois ainsi que 30 autres livres à 12 des plus pauvres femmes veuves de Noisy.

Comme pour le précédent une plaque en marbre gravée d’or rappelait aux générations futures cette grande libéralité mais elle a disparu comme beaucoup d’autres.
Tout cela va entrainer au cours du XVIIIème siècle, une série de procès entre le curé, les marguilliers et les assujettis au paiement des rentes qui remontent parfois au XVIème et même au XVème telle la rente d’un pourceau gras et d’un muid de méteil dont l’origine remonte à 1498.

D’où les vœux des Noiséens dans leur cahier de doléances du rahat de toutes ces charges.

Survient la Révolution. En 1789, les biens de la Fabrique auraient du normalement être attribués aux communes substituées aux paroisses. Il n’en fut rien .
Considérés comme biens du clergé, ils furent déclarés biens nationaux et mis en vente.
La Fabrique possède alors un territoire divisé en multiples parcelles d’une surface de 1564 perches (9 à 10ha) (une revenu de rentes sans doute avoisinant les 600 livres, revenu de la maison 350 livres en 1738)et d’une maison mise en vente le 19 décembre 1791 et le 12 novembre 1792 puis le 20 novembre 1794 pour les biens restants.
Tous les terrains de Noisy vont trouver acquéreurs à la différence des biens de la Charité, mis en vente en même temps, qui ne trouvent pas d’acheteurs. D’où la conclusion d’Hector Espaullard « Notre population, mieux inspirée par sa générosité que les législateurs au cœur sec, refusa de se prêter à la spoliation des pauvres. Sa conduite l’honore : il convient d’en ranimer le souvenir. »

La renaissance de la Fabrique

On aurait pu croire qu’avec la Révolution et la chute de l’Ancien Régime les Fabriques auraient définitivement disparu ? Il n’en fut rien.

Dès que la réouverture des églises est tolérée en 1795 , la Fabrique se réorganise. La première assemblée, présidée par Nicolas Blancheteau, destine les quêtes et dons des fidèles à reconstituer les objets indispensables au culte et à faire les réparations urgentes dans l’église.
La réélection annuelle des marguillers va reprendre suivant la coutume. On y retrouve les noms de Blancheteau, Leduc, Budor, Hanotelle, Espaullard, familiers des Noiséens.
La Loi du 18 germinal an X ( 8 avril 1802) rétablit officiellement les Fabriques pour veiller à l’entretien et la conservation des temples (sic) ainsi qu’à l’administration des aumônes . Suivant cette Loi , à partir de 1803, les membres du conseil de Fabrique doivent être nommés par l’évêque ou par le Préfet.

Mais apparemment à Noisy, soit par ignorance soit par mauvaise volonté, on garde l’ancien usage, ce qui fait qu’en 1807, lors d’une  visite de la paroisse, le vicaire général inflige un rappel à l’ordre et l’obligation désormais de soumettre les nominations à l’acceptation du Cardinal archevêque de Paris.
Quant à l’établissement du service de la Charité, nous avons vu que ses biens n’avaient pas trouvé preneurs lors de leur vente à Noisy-le-Sec. Mais contrairement à la Fabrique qui va renaitre, la Lo du 7 frimaire an V va désormais placer les institutions charitables sous la surveillance des municipalités. Après la Révolution de 1830, une ordonnance du29 avril 1831 remplacera définitivement l’appellation de Charité en bureau de bienfaisance. La plupart des rentes perpétuelles avaient été rachetées et soldées pour une somme globale.

Revenons à la Fabrique

Le 30 décembre 1809, un décret impérial règle définitivement la constitution des conseils de Fabrique en France. Noisy rentre en possession de quelques titres de rente, 46 fr, qui n’avaient pas été vendus comme biens nationaux

Le 8 décembre 1811, une assemblée extraordinaire est tenue à Noisy en présence de plus de 50 habitants afin d’augmenter et d’assurer les revenus de l’église et statuer sur les dépenses nécessaires tant pour l’intérieur que pour l’extérieur du bâtiment.
Un nouveau règlement est établi concernant principalement la location des bacs, les sonneries, les quêtes.
Notons que « M de Reusse, propriétaire de l’ancien château de Noisy et M Tripier, avocat, propriétaire de l’ancien fief du Londeau, sont très humblement suppliés de recevoir la charge de marguilliers d’honorer pour nous aider de leurs lumières, leurs conseils et leur protection ».

Les dons et legs sont repris comme en témoigne la plaque que l’on peut toujours vor sur un mur de l’église st Etienne, le dernier remontant à 1904. On peut y voir par exemple le nom de Marie-Jeanne Cochu, épouse Poupart qui par un testament daté du 19 aout 1854, a légué 4 000 fr au bureau de bienfaisance et 1 000 fr à la Fabrique, pour que les deux sommes soient employées au soulagement des pauvres et à l’entretien d’un autel dans l’église de Noisy. La plaque fait elle référence à une rente supplémentaire de  dite paroissienne. Elle se termine par les remerciements de « la Fabrique reconnaissante » pour les rentes émanant des vieilles familles de Noisy comme les Durin, les Cochu, les Budor ou les Blancheteau.

En 1813, intervient la réglementation des sonneries, leurs durées et leurs montants. Les clefs du clocher sont entre les mains de 3 personnes : le maitre d’école en a une pour le remontage de la cloche, le bedeau une deuxième et le desservant la troisième. Ils doivent immédiatement après usage les remettre à l’endroit où ils les ont prises.

Cela donne lieu en 1884 à un conflit entre la mairie et le curé Barthélémy. Le maire réclame une clef pour les sonneries civiles mais il essuie un net refus.

En 1843, le conseil de Fabrique qui fait office de pompes funèbres, déclare urgente la nécessité de faire de nouveaux tarifs plus conformes aux besoins présents de la paroisse. Conformément aux vœux de l’administration, ce ne sera finalement qu’en 1847 qu’une convention est établie entre la Fabrique et M Langlois, directeur de l’entreprise de pompes funèbres, rue de Chabrot à paris qui répartit les bénéfices entre les deux parties.

En 1864, la Fabrique offre une des trois nouvelles cloches de st Etienne. Ce qui donnera lieu par la suite à une anecdote pittoresque. Pendant la guerre de 1870, le 29 octobre , le conseil de Fabrique se réunit avec le conseil municipal et la garde nationale . Dans un grand élan de patriotisme, ils décident de faire dons de 3 des 4 cloches composant la sonnerie de l’église afin de les transformer en canons. Offre apparemment sans suite puisque les cloches sont toujours là.

A l’issue de cette guerre, la Fabrique adresse à l’administration l’état des dégâts dans l’église qui portent essentiellement sur la disparition des chaises et des prie dieux, des meubles abimés, de serrures brisées, de lustres dégradés et de la disparition de plusieurs objets de culte, le tout étant chiffré à 2 815 fr

En 1876, le conseil de Fabrique vote l’acquisition d’un orgue de 13 jeux à la maison Abbey de Versailles pour le prix de 11 500 fr, ainsi que la décoration du sanctuaire et de la nef.


Mais sous l’exercice du curé Fernique, entre 1896 et 1898, la belle ordonnance va se fissurer quand celui ci renouvelle totalement la composition du conseil de Fabrique en remplaçant les vieilles familles de Noisy par des membres de la population récemment arrivés dans la commune.

 

La fin du conseil de Fabrique

Cependant, ce ne seront ni la Révolution, ni les conflits qui auront raison de cette vénérable institution mais en 1905, la Loi sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Ainsi va disparaître ce qui a été au cœur de la vie des Noiséens depuis tant de siècles.
J’ai retrouvé aux archives de Noisy l’inventaire des biens de l’Eglise établi par l’administration en exécution de l’article 3 de la Loi du 9 décembre 1905.

Sont décrits les biens fonciers d’une valeur de 12 000fr pour l’église et 8 000frpour le presbytère ainsi que la liste de tous les objets conservés dans l’église et la sacristie. Cela va de 3 cordons d’aube à 1,50fr au maitre autel et à l’orgue estimé à 2 000fr. Y figure également la présence de 10 tableaux dont l’un « -le baptême du Christ » est estimé à 1 500fr (ne reste actuellement qu’une crucifixion).

 

Il est noté que « malgré les recherches minutieuses » aucun vase sacré n’a été découvert. En fait, ils avaient été retirés de l’église et cachés en lieu sûr.

Les deniers et titres de propriété n’y figurent pas non plus car la fameuse armoire spéciale a été mise à l’abri dans une maison particulière.

Il faudra attendre 1910 pour que le reliquat s’élevant à 1 054,05fr soit remis au receveur de la République. Sur le document, figure l’intitulé « ancienne Fabrique de Noisy-le-Sec »

 

Ainsi s’achève définitivement l’histoire de la Fabrique de st Etienne de NLS

 

Paule Bergé

 

Sources :

Noisy-le-Sec Village heureux ville martyre, Hector Espaullard

Archives municipales de Noisy-le-Sec.

 

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